La pression se renforce sur la Serbie pour mettre la main sur l'ex-chef militaire des Serbes de Bosnie, Ratko Mladic, après l'arrestation de Radovan Karadzic qui tente toujours de retarder son transfèrement devant la justice internationale.

Si la communauté internationale a dans son ensemble félicité Belgrade pour l'arrestation de Karadzic, l'un des fugitifs les plus recherchés au monde, plusieurs pays n'ont pas manqué de lui rappeler ses obligations.

«Les Serbes progressent dans la fermeture d'un chapitre hideux de leur passé, et j'espère seulement que Mladic sera le prochain», a déclaré la secrétaire d'État américaine, Condoleezza Rice.

Après la capture de Karadzic, l'Union européenne (UE) avait elle aussi accompagné ses félicitations d'un rappel : la pleine coopération de Belgrade avec le Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie est la condition de son intégration à l'Europe des 27.

Le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner avait rappelé, après l'arrestation de Karadic, qu'il n'était pas l'unique fugitif. «Il y en a un seul qui a été arrêté. Nous en attendons d'autres, nous ne pouvons pas nous satisfaire d'une seule arrestation», avait-il dit.

Outre Ratko Mladic, inculpé comme Radovan Karadzic de génocide, pour l'élimination de 8000 hommes et adolescents musulmans à Srebrenica, Goran Hadzic, l'ancien chef des Serbes de Croatie, est toujours en fuite.

Plusieurs pays européens tels que les Pays-Bas (pays d'accueil du TPI), la Belgique, la Finlande ou la Suède réclament que les derniers fugitifs soient arrêtés pour entériner l'Accord d'association et de stabilisation signé avec Belgrade en avril.

Cette exigence risque de décevoir le nouveau gouvernement serbe qui après l'arrestation de Karadzic espère une accélération du processus d'intégration de la Serbie à l'UE.

Arrêté lundi dernier à Belgrade, Karadzic avait dupé les autorités en adoptant l'apparence d'un gourou -- barbe fournie et cheveux longs -- et en se faisant passer pour un certain docteur Dragan Dabic, spécialiste de médecine alternative. Selon la presse serbe le nom de Dragan Dabic correspond à celui d'un soldat né en 1954 et tué en 1993 à Sarajevo.

Par l'intermédiaire de son avocat, Me Svetozar Vujacic, Karadzic a fait savoir qu'il assurerait lui-même sa défense devant le TPI, suivant ainsi l'exemple du défunt président serbe Slobodan Milosevic et de l'ultranationaliste Vojislav Seselj, actuellement jugé à La Haye.

En «excellente forme», Karadic qui s'est fait couper les cheveux et raser la barbe «est très combatif», a indiqué M. Vujacic à l'AFP en ajoutant : «Il a hâte d'entamer sa lutte et espère que la vérité et la justice prévaudront».

Me Vujacic doit déposer vendredi, au dernier jour du délai prévu par la loi, un recours contre le transfèrement de Karadzic au TPI. Des juges du tribunal de Belgrade pour les crimes de guerre auront alors trois jours pour se prononcer et l'avocat de Karadzic espère retarder le transfèrement jusqu'au début de la semaine prochaine.

Radovan Karadzic souhaite revoir son épouse Ljiljana Zelen-Karadzic, sa fille Sonja et son fils Sasa qu'il n'a pas revu depuis son inculpation il y a treize ans.

Mais leur visite à Belgrade est suspendue à une décision du Haut représentant international en Bosnie, Miroslav Lajcak, qui a ordonné en janvier la saisie des passeports des membres de la famille accusés d'appartenir au réseau qui soutenait la cavale de Karadzic.

A Belgrade, quelque 250 ultranationalistes serbes se sont rassemblés mercredi pour protester, pour la deuxième journée consécutive, contre son arrestation en scandant le nom de Karadzic et proférant des insultes à l'encontre des dirigeants pro-européens serbes.