La rude bataille des primaires a laissé des traces comme rarement dans le camp démocrate. A tel point que Barack Obama doit aujourd'hui s'employer à reconquérir les partisans de son ancienne rivale Hillary Clinton, en particulier les femmes. Le sénateur de l'Illinois s'efforce de consolider son avance au sein de l'électorat féminin, dont le vote pourrait être décisif le 4 novembre.

«Je ne dis pas que ces femmes sont amères (...) mais elles ne comprennent pas comment mettre ce dévouement et cette énergie derrière un candidat qui leur a enlevé Hillary Clinton», explique Susie Tompkins Buell, engagée dans la récolte de fonds pour la sénatrice de New York pendant les primaires, et qui ne cache pas ses réserves à propos du futur candidat démocrate à la présidentielle américaine.

Pour elle, le sénateur de l'Illinois doit témoigner de son respect pour Clinton -notamment en l'aidant à rembourser ses dettes de campagne- et prouver qu'il comprend les préoccupations de l'électorat féminin.

Car, selon un sondage Associated Press-Yahoo!, seuls 12% des soutiens de Clinton s'emballent aujourd'hui pour celui qui a battu leur candidate. Par ailleurs, le choix des républicaines modérées et des indépendantes reste encore incertain.

Barack Obama semble avoir bien compris le message. Il consacre tout un pan de sa campagne aux femmes, grâce notamment à un rapport présentant ses projets économiques pour elles et qu'il a fréquemment détaillé lors de réunions publiques exclusivement consacrées à ce sujet. Il n'hésite pas non plus à parler de son expérience d'enfant élevé par une mère célibataire. Il évoque les soucis d'argent qu'elle a connu ou ses difficultés en matière d'assurance-santé alors qu'elle était en train de mourir d'un cancer.

Le candidat démocrate a également engagé dans sa campagne d'anciens membres de l'équipe Clinton, parmi lesquels Dana Singiser, chargée des travaux sur l'électorat féminin. Son site Internet offre une importante section réservée aux femmes et propose dès la page d'accueil un «Bienvenue!» aux partisans de Clinton. Enfin, son équipe prépare des manifestations dans tout le pays pour célébrer le 88e anniversaire du droit de vote pour les femmes aux Etats-Unis, le 18 août prochain.

«Elles vont décider du prochain président», juge Anita Dunn, conseillère d'Obama. «Nous pensons qu'il peut vraiment prouver aux femmes de ce pays qu'il comprend ce qu'elles vivent».

Le candidat démocrate est pour cela aidé de son épouse Michelle, qui ne ménage pas ses efforts. Lundi, devant plusieurs centaines de femmes réunies lors d'un dîner à Chicago, elle n'a pas manqué de saluer Hillary Clinton. «Mon mari est un meilleur candidat grâce à elle», a-t-elle déclaré. Mes filles auront une autre image d'elles-mêmes grâce à elle».

Michelle Obama en a également profité pour énumérer les efforts de campagne de son époux pour convaincre les femmes: plus de 200 000 appels téléphoniques, 250 000 cartes postales envoyées aux électrices indécises, près de 300 groupes dédiés aux femmes sur son site Internet de campagne, parmi lesquels «Obama's Mamas», rassemblant les électrices seniors.

L'électorat féminin peut être potentiellement favorable à Obama, notamment les femmes mariées vivant dans les banlieues, qui ont souvent hésité entre républicains et démocrates au cours des dernières années. Selon un sondage réalisé par l'université de Quinnipiac et diffusé le 15 juillet, 55% des femmes soutiennent le sénateur de l'Illinois, contre 36% son rival républicain John McCain.

Les partisans d'Obama affirment que leur candidat est mieux placé pour comprendre les femmes que McCain, qui s'oppose au droit à l'avortement ou apparaît moins impliqué dans la lutte pour l'égalité salariale. Mais le camp républicain voit un vivier de voix potentiel au sein des indépendantes et des femmes appartenant à l'aile conservatrice du Parti démocrate dans des Etats comme la Pennsylvanie ou l'Ohio, que Hillary Clinton a remporté lors des primaires en mettant en cause le manque d'expérience présumé d'Obama ou ses éventuelles difficultés à comprendre les préoccupations économiques des familles ouvrières.

Mais, pour beaucoup de femmes, si les positions d'Obama sur l'avortement ou la violence sont importantes, la liste des revendications féminines est beaucoup plus longue. «On ne peut plus parler de «préoccupations féminines», mais de «préoccupations qui sont importantes pour les femmes», résume Liz Shirley, directrice du caucus des femmes démocrates de l'Ohio.