L'administration Bush, qui venait de faire un timide pas en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique au sommet du G8, a décidé de reporter à plus tard toute régulation des émissions de gaz à effet de serre, attisant la colère des défenseurs de l'environnement.

Ce délai, estiment les observateurs, implique que toute action dans ce domaine ne sera pas entreprise par l'actuelle administration mais laissée au successeur du président George W. Bush à la Maison-Blanche, en janvier 2009, Barack Obama ou John McCain.

Le report de toute décision, prôné dans un rapport de 588 pages publié vendredi par l'agence américaine de protection de l'environnement (EPA), intervient alors qu'en avril 2007 la Cour suprême des État-Unis avait ordonné à l'EPA de prendre des mesures de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.

L'administrateur de l'EPA Stephen Johnson a déclaré que plutôt que d'obtenir un consensus «sur des sujets d'une grande complexité et controversés», il préférait attendre la publication de points de vue d'autres agences pendant une période de 120 jours.

L'EPA dit aussi douter que les «gaz à effet de serre puissent être contrôlés efficacement par le Clean Air Act», la législation anti-pollution.

«Le refus de l'administration Bush de répondre à la Cour suprême et de faire quelque chose contre le réchauffement climatique n'est pas seulement illégal, c'est scandaleusement immoral», a réagi Danielle Fugere de l'organisation écologiste Les Amis de la Terre.

Les décisions de l'EPA soulignent «l'absolu manque de crédibilité» de son administrateur, relève de son côté David Bookbinder, conseiller climat de la plus ancienne association américaine de défense de l'environnement, Sierra Club.

«Le public américain, le Congrès, les responsables mondiaux (...) comptent les jours avant le départ de cette administration et (l'arrivée d'un) nouveau président qui annulera les dommages causés par le président Bush et rattrapera le temps perdu pendant pratiquement une décennie», a-t-il ajouté.

Déjà, début juin, la minorité républicaine au Sénat avait torpillé le premier grand projet de loi sur le climat, impliquant qu'aucune initiative ne pourrait aboutir aux États-Unis avant une nouvelle législature.

Le président Bush a toujours rejeté toute contrainte qui ne pèserait pas aussi sur les économies émergentes comme la Chine ou l'Inde et a refusé de signer le protocole de Kyoto entré en vigueur en 2005.

Les défenseurs de l'environnement estiment que depuis son accession à la présidence en 2001, son administration a ignoré les dangers du réchauffement climatique et même tenté de le nier.

Lors du récent sommet du G8 au Japon, les États-Unis se sont tout de même ralliés au principe de réduire de 50% les émissions polluantes d'ici 2050 sur une base globale. Mais les principales économies n'ont pas précisé quelle serait l'année de référence pour calculer cette réduction, ni comment se répartiraient fardeau et calendrier.

L'an dernier, la Cour suprême avait fait voler en éclat les arguments régulièrement avancés par l'EPA, et derrière elle l'administration Bush, pour ne pas agir contre les émissions polluantes: oui, avait décidé la Cour, le réchauffement climatique représente un grave danger, oui l'EPA peut et doit le prendre en considération.

Parallèlement, la décision de la Cour avait ouvert une brêche en affirmant qu'un État, en l'occurrence le Massachusetts (nord-est), subissait des dommages sur ses côtes du fait du réchauffement climatique et qu'il pouvait obtenir réparation en justice.

Des poursuites sont aussi en cours contre l'EPA qui refuse de réguler les émissions des centrales thermiques, responsables de 40% des rejets de CO2.