Le régime du Zimbabwe jubilait au lendemain du rejet à l'ONU d'un projet de sanctions contre ses dirigeants et a assuré qu'il allait régler en interne la crise née de la réélection controversée du président Robert Mugabe fin juin.

«Le veto aux Nations unies est une victoire diplomatique historique, pas seulement pour le Zimbabwe, mais aussi pour le reste de l'Afrique», a commenté emphatique le ministre de l'Information Sikhoanyiso Ndlovu, joint par l'AFP.

«Nous voulons remercier les pays qui nous ont soutenus à l'ONU et leur dire que nous ne les décevrons pas et que nous allons régler nos problèmes nous-mêmes», a ajouté M. Ndlovu.

La Chine et la Russie ont mis leur veto, vendredi au Conseil de sécurité de l'ONU, à un projet de résolution visant à adopter des sanctions contre le Zimbabwe, après la réélection de M. Mugabe, 84 ans et au pouvoir depuis 1980.

Le projet, rédigé par les Américains, a recueilli neuf voix (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Belgique, Croatie, Italie, Costa Rica, Panama, Burkina Faso), contre cinq (Chine, Russie, Afrique du Sud, Libye, Vietnam) et une abstention (Indonésie).

M. Ndlovu a particulièrement salué le président sud-africain Thabo Mbeki pour ne pas avoir «cédé à la pression internationale et à la machination occidentale».

Le président Mbeki, qui a toujours prôné une «diplomatie discrète» envers son voisin, est chargé par ses pairs de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) d'une mission de médiation au Zimbabwe.

Dans le cadre de cette médiation, des représentants du pouvoir et de l'opposition zimbabwéenne se sont rencontrés jeudi et vendredi à Pretoria, pour la première fois depuis le simulacre de second tour de la présidentielle le 27 juin, où M. Mugabe était seul candidat.

Le chef de l'opposition, Morgan Tsvangirai, arrivé en tête du premier tour de la présidentielle le 29 mars, avait en effet renoncé à se présenter au second tour en raison d'un déchaînement, selon lui, de violences contre ses partisans.

«Imposer des sanctions aurait eu des conséquences négatives sur le processus actuel de dialogue entre les parties», a estimé samedi le gouvernement sud-africain pour justifier son vote à l'ONU.

«Le rôle de la communauté internationale doit être d'encourager les partis politiques du Zimbabwe à approfondir et consolider le processus actuel de dialogue», a-t-il ajouté.

De son côté, la Russie a expliqué son veto en disant qu'adopter des sanctions contre le Zimbabwe aurait constitué «un dangereux précédent» d'ingérence dans les affaires intérieures d'un pays.

Samedi, le principal parti d'opposition au Zimbabwe, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), n'a pas souhaité commenté le rejet de la résolution à l'ONU.

Takura Zhangazha, un analyste politique de Harare, a estimé que le MDC n'avait plus beaucoup d'options après ce revers.

«Le MDC n'a plus qu'à se tourner vers les leaders africains parce que toute tentative des Nations unies se heurtera à un veto», a-t-il dit. «L'option Union africaine (UA) ou SADC est la seule route réaliste à emprunter pour tenter de résoudre la crise.»

L'UA et la SADC n'ont, en tant que blocs, jamais condamné publiquement M. Mugabe. Après sa réélection contestée, elles avaient opté pour une position conciliante, se contentant de souhaiter la formation d'un gouvernement d'union nationale et d'encourager les efforts de médiation de M. Mbeki.

Réconcilier les positions du pouvoir et du MDC risque toutefois d'être difficile. Le président Mugabe pose comme préalable d'être reconnu comme le chef de l'Etat, ce que l'opposition refuse catégoriquement.

Le MDC exige de son côté l'arrêt des violences mais rapporte chaque jour de nouvelles attaques contre ses partisans. Selon le parti, 113 sympathisants de l'opposition ont été tués depuis les élections générales du 29 mars.