La justice serbe attendait toujours lundi le recours déposé contre le transfèrement de Radovan Karadzic vers le TPI de La Haye, alors que l'opposition nationaliste se mobilise pour dénoncer cet acte que certains assimilent à une véritable «traîtrise» du gouvernement.

Le recours de l'avocat de Radovan Karadzic n'était pas encore arrivé lundi en fin de matinée au Tribunal chargé du dossier, ont déclaré à l'AFP une porte-parole de cette instance et l'avocat lui-même, Me Svetozar Vujacic.

«Le recours n'est pas encore arrivé», a déclaré la porte-parole, Ivana Ramic, ajoutant être «tout à fait sûre» que ce recours n'était pas encore à la disposition du Tribunal.

«Je suppose qu'il (le recours) n'est pas encore arrivé en raison des jours non-ouvrables, samedi et dimanche», a déclaré à l'AFP Me Vujacic ajoutant: «le plus tard sera le mieux».

Il était impossible d'entrer en contact en début d'après-midi avec l'avocat et le Tribunal.

Une fois le Tribunal serbe pour les crimes de guerre en possession de ce recours, un panel de juges dispose d'un délai pouvant aller jusqu'à trois jours pour prendre une décision.

Par la suite, l'inculpé n'a plus aucune possibilité de recours et il revient au ministère serbe de la Justice de signer la décision sur le transfèrement.

Une fois le recours arrivé, tout peut par conséquent s'enclencher très rapidement.

Me Vujacic, cité par la radio B92, a déclaré dimanche que les autorités serbes feraient «tout leur possible» pour que «le transfèrement ait lieu avant mardi», le jour où l'opposition nationaliste a convoqué une manifestation à Belgrade pour protester contre l'arrestation de Karadzic.

Cette manifestation a été convoquée à l'appel du Parti radical serbe (SRS, ultra-nationaliste).

Une députée nationaliste du SRS, Vjerica Radeta, a lancé dès vendredi une violente diatribe contre le gouvernement pro-européen du président Boris Tadic, le mettant en garde contre «la malédiction qui a accompagné tous les traîtres de l'histoire de la Serbie».

Davantage mesuré, l'ancien Premier ministre serbe, le nationaliste Vojislav Kostunica, a dénoncé pour sa part l'«injustice» du TPI.

Il est sûr de toucher là une corde dans l'opinion publique serbe, qui considère en majorité le Tribunal comme une instance «anti-serbe».

Radovan Karadzic doit répondre devant le TPI de génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre pour son rôle pendant la guerre de Bosnie (1992-1995).

Entretemps, la presse serbe continue de livrer son lot quotidien de révélations sur la vie clandestine de Radovan Karadzic.

Plusieurs journaux ont indiqué lundi que les services secrets serbes, mis sur la piste de Radovan Karadzic par un appel téléphonique anonyme, filaient «jour et nuit» l'ancien dirigeant des Serbes de Bosnie, qui vivait alors sous la fausse identité du Dr Dragan Dabic.

«Nous avons établi le contact avec lui lors d'un symposium tenu du 23 au 25 mai à Belgrade et depuis, plus de 50 agents» se sont relayés pour le surveiller 24 heures sur 24, mais la plupart d'entre eux ne savaient pas «de qui il s'agissait», a déclaré au quotidien Press une source policière ayant requis l'anonymat.

Seules quelques personnes étaient au courant de la véritable nature de la filature du faux Dr Dabic, à savoir les responsables des services secrets et le procureur pour les crimes de guerre, Vladimir Vukcevic, a, de son côté, rapporté le quotidien Vecernje Novosti.

La principale difficulté de cette enquête était tout simplement de vérifier si le docteur Dabic était effectivement Radovan Karadzic.

Selon le quotidien Press, qui cite une source policière, les services secrets ont eu recours à un stratagème, en envoyant chez le «Dr Dabic» deux agents se présentant comme un couple souffrant de problèmes de stérilité. Ils en ont profité pour subtiliser discrètement quelques cheveux du faux docteur, de façon à procéder à des vérifications d'identité par ADN.