Lors de la clôture de la réunion du G8 cette semaine, les pays industrialisés ont affirmé qu'il fallait «prendre toutes les mesures possibles» pour répondre à la crise alimentaire mondiale qui affecte près d'un milliard d'êtres humains, sans pour autant annoncer de nouvelles mesures.

L'organisation canadienne Développement et Paix leur a répondu à sa façon en publiant un nouveau rapport qui appelle à la restructuration en profondeur du système agricole.

Près d'un milliard de personnes seront bientôt victimes de sous-nutrition et il est urgent de restructurer le système alimentaire mondial, notamment en favorisant «la reconstruction des économies agricoles locales et nationales», estime un nouveau rapport de l'organisation canadienne Développement et Paix, rendu public cette semaine.

Intitulé La faim et le profit : crise du système alimentaire, le rapport juge impératif de restaurer la «souveraineté alimentaire» de chaque pays. C'est la seule manière d'éradiquer les crises alimentaires qui ont provoqué les émeutes de la faim au printemps, écrit l'ONG liée à l'Église catholique du Canada.

Face à l'explosion des prix des aliments, qui ont grimpé de 83% en trois ans, des milliers d'affamés ont manifesté dans une vingtaine de pays, des Philippines au Mozambique en passant par Haïti, au cours des derniers mois. Des dizaines de manifestants sont morts sous les balles des militaires, surtout en Haïti et en Égypte.

Selon l'ONG, l'industrialisation forcée des agricultures des pays du Sud menée entre 1950 et 1980 a rendu les agriculteurs locaux «très vulnérables aux pressions du marché mondial».

De plus, le rapport dénonce les programmes d'ajustements structurels pilotés par la Banque mondiale et le Fonds mondial international, ainsi que les accords sur l'agriculture signés par l'Organisation mondiale du commerce.

Ces politiques économiques ont empêché de nombreux États de fournir «un appui efficace à la production agricole locale», tout en permettant à de grandes multinationales de venir concurrencer les petits producteurs locaux sur les marchés intérieurs. Tout cela, écrit l'ONG, a acculé «toujours plus de personnes à la pauvreté».

«Ce travail de mise en perspective est très intéressant car cela montre qu'il y avait de nombreux problèmes au sein du système alimentaire mondial bien avant la crise de cette année», estime Guy Debailleul, expert en économie agroalimentaire et titulaire de la chaire en développement international de l'Université Laval.

Spéculation

Le rapport montre aussi du doigt la course à la production aux biocarburants, les changements climatiques et leur lot de crues et de sécheresses, les guerres et la hausse du prix du pétrole. Mais, selon l'ONG, la première responsable de la crise alimentaire est la spéculation sur le cours des denrées, surtout des céréales.

Si les pays du G8 ont déclaré cette semaine, en clôture du sommet de Toyako (Japon), qu'il fallait «prendre toutes les mesures possibles» pour répondre à la crise alimentaire mondiale, ils n'ont fait aucune annonce nouvelle.

Rappelant qu'ils avaient déjà déboursé 10 milliards de dollars depuis le début de l'année, les huit puissances économiques, qui produisent quelque 60% de la richesse mondiale, ont invité «les autres donateurs» à mettre la main à la poche.