Barack Obama est opposé à l'indemnisation des descendants d'esclaves, une position critiquée par certains mouvements et dirigeants de la communauté noire américaine. Pour celui qui pourrait devenir le premier président noir de l'histoire des États-Unis, le meilleur moyen de combattre l'héritage de l'esclavage est de lutter contre la pauvreté, améliorer l'éducation et la couverture de santé de la population.

Le futur candidat démocrate à la présidentielle devait s'exprimer samedi à Orlando, en Floride, devant la National Urban League, un mouvement afro-américain.

«J'ai dit par le passé, et je le répète de nouveau, que les meilleures réparations que nous puissions fournir, ce sont de bonnes écoles (...) et des emplois pour les gens au chômage», a récemment souligné le sénateur démocrate de l'Illinois.

Une vingtaine de membres du Congrès ont présenté une proposition de loi instituant la création d'une commission qui serait chargée d'étudier la mise en place d'indemnisations et programmes réparant les conséquences de l'esclavage des Noirs aux États-Unis.

L'Association nationale pour l'avancement des gens de couleur (NAACP), le plus ancien mouvement de lutte pour les droits civiques aux Etats-Unis, est favorable à un tel texte. Plusieurs municipalités américaines et un important syndicat, la Fédération des employés d'Etat, de comtés et de municipalités ont également apporté leur soutien.

Kibibi Tyehima, co-président de la Coalition nationale des Noirs pour des réparations en Amérique, estime que Barack Obama n'en fera rien. «Ne soyons pas naïfs. Le sénateur Obama se présente à l'élection présidentielle et il se bat constamment pour sa survie politique (...) Il n'est pas réaliste de s'attendre à le voir faire autre chose que ce qu'il a déjà fait».

Depuis le début de sa campagne, Barack Obama s'est présenté comme un candidat rassembleur, même si le candidat républicain John McCain l'a accusé cette semaine de jouer la carte de la couleur. La question est ensuite revenue sur le tapis lors d'une réunion publique de M. Obama, vendredi à Saint Peterbsurg, en Floride.

Durant ce meeting, Barack Obama a été interrompu par trois militants qui lui reprochaient de ne pas en faire assez pour la communauté noire. «La seule façon de résoudre nos problèmes dans ce pays est de le faire ensemble, noirs, blancs, hispaniques, asiatiques, indiens, jeunes, vieux, handicapés, gays, hétéros, voilà ce que doit être notre ordre du jour», a répondu M. Obama.

Sa position sur les indemnisations n'est pas non plus nouvelle. Il avait déjà exprimé ses réserves sur la question lors de sa campagne sénatoriale en 2004. «Je crains que des réparations ne soient une excuse pour certains, 'on a payé pour notre dette» et d'éviter ainsi la tâche la plus difficile», expliquait-il.

Pour la NAACP, ces réparations pourraient prendre la forme de programmes d'aides du gouvernement, dont bénéficieraient toutes les communautés. De meilleures écoles dans les centres villes défavorisés profitent à tous, souligne Hilary Shelton, directeur du bureau de Washington du NAACP.

La National Urban League, devant laquelle M. Obama devait s'exprimer samedi,

juge elle le terme de «réparations» à la fois trop vague et trop chargé politiquement. Mais Barack Obama, souligne le président de la Ligue Marc Morial, doit dire ce qu'il compte faire pour combler le fossé entre blancs et noirs, atténuer «les effets de la discrimination raciale».

Vernellia Randall, professeur de droit à l'Université de Dayton, pense que Barack Obama «se trompe lourdement». Aider les pauvres en général ne changera rien, les noirs seront toujours plus pauvres que les blancs, fait-elle valoir. «Les gens disent qu'on ne peut pas se présenter et être élu si on dit ce genre de choses. Qu'est ce que ça signifie, qu'on n'est pas vraiment prêts pour un président noir?»