Le président colombien Alvaro Uribe «doit aussi rectifier certaines choses», «changer ce vocabulaire radical, extrémiste, de haine», a déclaré lundi sur RFI Ingrid Betancourt, en confirmant que, par crainte d'un acte de vengeance des FARC, elle ne se rendrait pas en Colombie pour la marche prévue le 20 juillet en faveur des otages.

S'agissant des rumeurs de rançon versée en échange de sa libération, Ingrid Betancourt pense que «peut-être il y a eu, à un plus haut niveau, une infiltration», «il y a eu quelqu'un qui, quelque part, leur a envoyé une information fausse qu'ils ont crue». Donc, a-t-elle ajouté, «probablement, oui, il y a eu quelqu'un qui a reçu de l'argent, en tout cas ce n'était pas les gens qui étaient avec nous».

Tout en saluant l'adresse et les «ficelles» du président Uribe, l'ex-otage franco-colombienne a estimé qu'il devait «rectifier» le tir, au moins dans son discours.

«Le président Uribe a été très adroit, très fort, et il a beaucoup de ficelles dans sa politique de sécurité nationale», a reconnu l'ex-sénatrice lors d'une émission spéciale sur Radio France Internationale, radio qui lui a transmis de nombreux messages de soutien durant sa détention.

Mais, a-t-elle ajouté, «le président Uribe -non seulement le président Uribe mais la Colombie entière- doit aussi rectifier certaines choses», «on est arrivé au moment où il faut changer ce vocabulaire radical, extrémiste, de haine, de mots très forts qui blessent intimement l'être humain».

Ingrid Betancourt a appelé le président Uribe à donner «à l'autre l'espace de respect et de tolérance pour qu'il garde la face et pour qu'il puisse à un moment donné accepter de parler avec celui qu'il haït, l'ennemi qu'il combat».

L'ex-sénatrice a par ailleurs confirmé que, par mesure de prudence et sur les conseils de sa famille, elle avait décidé de ne pas se rendre en Colombie pour participer à la marche du 20 juillet.

«J'aurais voulu, mais j'ai ma famille qui m'a fait toute une (rire), enfin on s'est réuni, ils ne sont pas tellement d'accord, ils ont peur. Ils pensent qu'ils ont le droit de donner leur avis parce qu'ils ont beaucoup lutté. Mes enfants ont même dit que, s'il fallait mourir, ils viendraient avec moi mourir en Colombie», a-t-elle dit.

«Donc, non, je pense qu'il faut être intelligent, ce n'est peut-être pas le moment de rentrer, les FARC ont pris un coup terrible, ils pourraient avoir envie de se venger ou de faire quelque chose pour redorer leur blason», a-t-elle expliqué. «Il vaut mieux être prudent. (...) On peut faire les choses très bien d'ici.»

Concernant son avenir personnel, Ingrid Betancourt n'a pas exclu de reprendre une carrière politique en Colombie, mais a jugé cette hypothèse prématurée à ce stade. Les bons sondages, «ça me donne envie de servir la Colombie de tout mon coeur mais je crois que c'est trop tôt pour parler de ces choses là, on ne sait même pas quelles vont être les règles du jeu». En outre, a-t-elle ajouté, le président Uribe «en voudrait bien un troisième (mandat), s'il réussit, pourquoi pas?»