Les anciens communistes ont remporté une large victoire aux élections législatives en Mongolie, a annoncé la Commission électorale jeudi, mais le pays restait en état d'urgence après de violentes manifestations qui ont fait cinq morts mardi.

Le Parti populaire révolutionnaire mongol (PPRM, anciens communistes) a remporté 47 sièges, sur les 76 que compte le Parlement. Son principal rival en a obtenu 26, a précisé la Commission électorale, qualifiant le scrutin d'«honnête» en dépit d'accusations d'irrégularités.

Les Démocrates ont en effet immédiatement dénoncé ces résultats. «Je suis profondément attristé que cette élection ait été volée», a déclaré à l'AFP son leader, Tsakhiagiin Elbegdorj. «Il faut que les suffrages soient recomptés. Le résultat est faux».

Les soupçons de fraude électorale avaient alimenté les violences mardi soir dans la capitale. Pourtant, M. Elbegdorj a indiqué ne pas s'attendre à de nouveaux troubles, estimant que la situation pouvait «se résoudre à travers la négociation».

Les rues d'Oulan Bator avaient retrouvé le calme dès mercredi mais la situation reste tendue.

La victoire des anciens communistes devrait permettre au pays de sortir du statu quo entre les deux principales formations, générateur d'inertie et d'instabilité depuis quatre ans. Lors des précédentes législatives de 2004, les deux partis s'étaient retrouvés quasiment à égalité, ce qui les avait obligé à se partager le pouvoir pendant quatre ans.

Mardi soir, 8000 personnes avaient manifesté dans le centre d'Oulan Bator, et des centaines d'entre eux s'étaient violemment opposés à la police anti-émeutes avant notamment d'incendier le siège du PPRM. Les anciens communistes avaient revendiqué la victoire dès lundi, sans attendre les résultats officiels, ce qui avait exaspéré leurs opposants.

Le porte-parole de la commission électorale, Purevdorjiin Naranbat, a assuré jeudi que le scrutin s'était déroulé de manière «honnête». «Certains n'ont pas accepté que leurs candidats aient perdu. Nous avons compté et recompté mais le résultat est resté le même, c'est bien qu'il n'y avait pas de problème».

En début de semaine, les Démocrates avaient accusé le PPRM d'avoir «triché pendant le processus électoral» et d'avoir «volé» leurs voix. Les anciens communistes, les jugeant mauvais perdants, les avaient accusés à leur tour de jeter de l'huile sur le feu.

Tard mardi, le président avait décrété l'état d'urgence, une première dans l'histoire de cette jeune démocratie.

Beaucoup de Mongols ont été choqués par les violences, alors que le pays était passé au multipartisme en 1990 sans la moindre effusion de sang, tournant pacifiquement la page de 70 ans de soviétisme.

«En 1990, tous les dimanches, des milliers d'entre nous se rassemblaient dans le centre pour manifester. Mais les organisateurs veillaient à éviter tout débordement. La situation a visiblement beaucoup changé», a regretté cette semaine le ministre des Affaires étrangères Sanjasurenngiin Oyun.

«Les choses ont bien changé», a renchéri Songino Enkh-Amar, ancien militant pro-démocratie qui a été le témoin des violences mardi. «Les Démocrates ont perdu toute autorité morale en incitant à ce genre de destructions insensées».

Les émeutiers, au nombre de 300 selon le gouvernement, étaient pour la plupart des jeunes gens défavorisés, selon de nombreux témoignages.

En Mongolie, vaste pays comptant moins de 3 millions d'habitants, un tiers de la population vit avec moins de 1,30 euro par jour.