L'ancien chauffeur de ben Laden, Salim Hamdan, a plaidé non coupable lundi matin sur la base de Guantanamo à l'ouverture de son procès, le premier devant un tribunal militaire d'exception, a-t-on appris auprès du Pentagone.

Toute possibilité d'un accord entre l'accusation et la défense, qui aurait suspendu la tenue de ce premier procès devant une commission militaire depuis la seconde guerre mondiale, est donc annulée.

Yéménite âgé d'une quarantaine d'années, Salim Hamdan comparaît pour «complot» et «soutien matériel au terrorisme», soupçonné d'avoir suivi des entraînements dans des camps d'Al-Qaeda en Afghanistan et d'avoir livré des armes à travers le pays.

Après plus de six ans d'enfermement à Guantanamo, il encourt la prison à vie à l'issue d'un procès prévu pour durer deux semaines.

Si l'ouverture de ce premier procès constitue une victoire pour l'administration Bush après des années de bataille juridique, d'autres procédures en cours devant une cour fédérale de Washington pourraient, elles, compliquer sa tâche.

La Cour suprême a en effet autorisé mi-juin les détenus de Guantanamo à contester leur détention devant la justice civile. Quelque 250 dossiers sont actuellement entre les mains des juges.

Lundi, le ministre de la Justice Michael Mukasey a demandé «expressément au Congrès de légiférer» pour déterminer les modalités d'application de cette décision, soucieux notamment que les procédures ne retardent pas les procès militaires.

Une vingtaine de détenus dont cinq accusés d'avoir participé aux attentats du 11 septembre 2001 doivent comparaître devant des tribunaux militaires.

Dans la salle d'audience de Guantanamo, le tribunal devait choisir lundi cinq juges militaires pour conduire le procès de M. Hamdan. La majorité des deux tiers sera nécessaire pour déclarer ou non la culpabilité et le même jury prononcera le verdict.

Les avocats de M. Hamdan ont déjà dénoncé un procès «injuste» et «malhonnête» et annoncé qu'ils feront appel de la décision finale devant la justice civile.

«Ce sera un procès équitable», a estimé à l'inverse Bryan Whitman, porte-parole du Pentagone devant la presse lundi. «Il s'agit de personnes qui ont accompli des actes illégaux, contre lesquels il y a suffisamment de preuves pour les tenir pour responsables de leurs crimes», a-t-il ajouté.

Pour ses avocats, M. Hamdan n'était qu'un simple employé du chef d'Al-Qaeda et n'a pas participé à des actions terroristes. Lors du procès, ils vont essayer d'obtenir l'invalidation de certaines «preuves» retenues contre leur client et obtenues sous la contrainte, voire la torture, selon l'accusation elle-même.

En créant les commissions militaires fin 2006, le Congrès américain avait refusé les «preuves» obtenues sous la torture mais, n'avait pas interdit celles obtenues à l'issue d'interrogatoires musclés ou humiliants, comme celui que Hamdan assure avoir subi sous la conduite d'une femme.

Dans ces derniers cas, le Congrès laissaient les juges décider de la recevabilité de ces «preuves» au coup par coup.

Selon des documents révélés par l'accusation, Salim Hamdan a en outre été réveillé toutes les heures pendant cinquante jours en 2003, une tactique d'épuisement avant interrogatoires.

Quoi qu'il en soit, même en cas d'acquittement, M. Hamdan ne sera pas forcément remis en liberté. Il a en effet été déclaré précédemment «combattant ennemi», une qualification suffisante pour légitimer une détention illimitée.