La Cabane d'à côté n'est pas littéralement à côté de la première Cabane du Pied de cochon. Mais elle n'est pas très loin, dans un autre rang de Saint-Benoît-de-Mirabel. Nichée plus discrètement, dans un univers plus bucolique. On s'y sent dans une campagne coquette plus qu'à la première cabane. Même la route que le GPS propose pour s'y rendre est plus charmante, serpentant d'un village à l'autre, entre les maisons ancestrales et de jolis paysages ruraux.

Cette cabane est aussi plus petite, moins bruyante. On entre pratiquement dans la cuisine, que l'on peut observer en attendant dans une antichambre tout en bois, où l'on sert l'apéro - il faut essayer le gin au sapin -, avant que tout le monde soit arrivé ou que la table se libère. Et puis, on passe à la grande salle vitrée où a lieu le festin. Parce que même si on est dans une version un brin plus raffinée, plus intime, que la première cabane, il n'est pas question, ici, de peu manger. On repart d'ailleurs les mains pleines de contenants remplis de restes. Le lendemain, c'est encore et toujours délicieux.

Le menu de cette cabane, qui n'est pas attachée à la saison des sucres ou des pommes, mais qui roule à longueur d'année, varie selon les arrivages, les récoltes, les saisons, bien sûr. Parce qu'au-delà de la cuisine, c'est maintenant toute une opération fermière que pilotent Martin Picard, son équipe et son acolyte Vincent Dion Lavallée, qui veille sur ce deuxième établissement.

Fait intéressant : Picard a découvert, en se penchant sur le cas du sirop, que celui-ci ne perdait pas vraiment de qualité avec le temps. Il n'y a donc aucune raison gustative de consommer absolument le sirop en mars ou en avril quand il vient tout juste d'être bouilli.

Le rituel printanier demeure sympathique. Mais il n'est pas immuable. Il n'y a donc rien d'anathème à le décliner sur des thèmes hivernaux ou estivaux...

Que nous a-t-on servi lorsque nous y sommes passés en février, avant le début officiel de la saison des sucres ? Une soupe aux pois où flottaient des boulettes de viande de canard, glacées à l'érable, ponctuée de cheddar et d'une crème montée à l'érable. Voici exactement le genre de plat dont il faut se méfier quand on mange la cuisine de Vincent Dion Lavallée : c'est tellement savoureux et réconfortant - les boulettes de canard ! Moelleuses ! On veut un plat juste de ça ! Or, ce n'est que le premier pas d'une longue route.

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La Cabane d'à côté est plus petite, moins bruyante.

Arrive ensuite l'un de mes plats préférés : de la truite fumée au gros gin, avec vinaigrette babeurre et chou fermenté, servis avec la fraîcheur de quelques feuilles de sucrine, mais surtout des rondelles de concombres du Québec marinés dans le gin eux aussi, un peu comme des cornichons, qui viennent trancher la richesse du poisson. C'est à la fois riche et léger, un peu comme lorsque l'on sert de la salade aux oreilles de crisse à la Cabane principale. J'aime cette façon d'alléger les classiques sans perdre la moindre profondeur de goût.

Puis viennent les plus gros canons. Des crêpes de sarrasin jaune frites dans du gras de canard accompagnant du jambon maison brûlé aux lies de cidre, des endives du Québec en escabèche - magnifique travail d'amertume et de fraîcheur - et un fromage louché de brebis qui se mange pratiquement à la cuillère.

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La truite fumée au gros gin, avec vinaigrette babeurre et chou fermenté

L'omelette de la cabane ? Elle prend ici la forme d'une création roulée avec crème de pleurotes et de morilles du Québec, pochés dans le « réduit » d'érable, et le tout est fini au beurre noisette, avec des tranches de champignons de Paris frais. Je ne suis pas certaine que la crème de champignons fonctionne de façon optimale avec la texture de l'omelette et pour la présentation. Je crois que j'aurais préféré manger les champignons en morceaux, poêlés, directement dans les oeufs. Mais j'ai rapidement oublié ce plat, renversée par la tartine de pain aux raisins et à la cannelle servie avec de la crème fraîche maison, du sucre d'érable râpé et du foie gras au sel. Dessert ? Plat de petit-déjeuner ? Entremets ou simplement version québécoise de la classique tartine briochée au foie gras française, avec garniture légèrement sucrée ? Ne manquait que le sauternes. Fondant, gras, sucré... C'est pour avoir faim pour ce genre de plat qu'il ne faut pas manger trop de soupe.

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L'omelette de la cabane, roulée avec crème de pleurotes et de morilles du Québec, pochés dans le « réduit » d'érable, et le tout fini au beurre noisette, avec des tranches de champignons de Paris frais.

Et ce n'est pas terminé. Cailles glacées au jus d'oignon brûlé et au sirop d'érable, poitrine de canard vieillie rôtie sur l'évaporateur, glacée au sirop et à la camomille du jardin, avec purée d'oignon au sirop, pâté de lapin aux carottes glacées et petits pois aux abats de lapin...

Rendue là, mes souvenirs de chaque bouchée sont moins précis. Mais rien ne détonne. Les viandes sont tendres. Tout est à la fois salé et sucré. Les carottes et les pois sont les bienvenus.

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La caille minestrone, glacée au jus d'oignon brûlé et au sirop d'érable

Pour le dessert, on continue avec le sirop... Beignets au sucre d'érable, dulce de leche à l'érable, pomme du verger gelée, préservée et pochée au sirop - une découverte formidable, le fruit est tendre, juste assez acidulé. On termine avec une crème anglaise à l'érable et le croquant d'un peu de « crumble ». J'aurais aimé vous parler de la tarte aux cerises fermentées et à la camerise, avec sucre à la crème, crème au sumac, glace de dulce de leche, ainsi que de la bagatelle à l'érable, mais rendue là, je n'avais vraiment plus faim. La prochaine fois, je commencerai par la fin.

3595, montée Robillard, Saint-Benoît-de-Mirabel, Québec, J7N 2S3

Notre verdict

On paie : 58 $ par personne pour le repas ; 29 $ par personne pour les 4 à 12 ans. Gratuit pour les plus jeunes.

On boit : Beaucoup de vins nature, de petits producteurs, triés sur le volet par l'équipe du Pied de cochon. Des produits québécois.

On se sent : Bien accueilli par une équipe sympathique et efficace, notamment parce que le chef est sur place et vient à table parler des plats. Aussi beaucoup de belles explications pour les vins.

On voit : Un aménagement tout en bois, fidèle à l'esthétique des cabanes à sucre. On aime les grandes fenêtres vitrées, les tables conçues pour accueillir la neige pour la tire.

On adore : La qualité de la cuisine, le fait que ça soit plus petit, plus intime, que la première Cabane du Pied de cochon.

On aime moins : Pas toujours facile d'avoir une réservation.

On y retourne ? Oui !

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Un dessert à la pomme