(Paris) Le caviar français, comme tout mets d’exception, a été malmené par la crise sanitaire, mais les producteurs placent de grands espoirs dans les dernières avancées de la génétique pour optimiser leurs élevages d’esturgeons.

La France produit 43 tonnes de caviar par an, derrière l’Italie (environ 50 tonnes) et surtout la Chine (environ 120 tonnes).

La COVID-19 a eu un « impact catastrophique sur notre secteur d’activité », constate Laurent Dulau, directeur général de Sturgeon, premier producteur français de caviar.

Résultat, « un effondrement » du marché compris entre -20 et -30 % de ventes en 2020 selon M. Dulau, qui espère que les fêtes de fin d’année permettront de limiter la casse.

Dans cette sinistrose économique, les producteurs placent de grands espoirs dans la génétique.

Jusqu’à présent, les pisciculteurs devaient patienter deux, voire trois ans avant de pouvoir déterminer lesquels de leurs poissons étaient mâle ou femelle et dans ce dernier cas susceptibles de produire les précieux œufs et donc de rentabiliser l’élevage.

Mais une équipe internationale de recherche menée par le Leibniz-Institute of Freshwater Ecology and Inland Fisheries en Allemagne, en partenariat en France avec l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) et d’autres partenaires, « vient de découvrir une séquence d’ADN spécifique du génome des esturgeons de sexe femelle », a annoncé l’Inrae.

Il est désormais possible, chez de tout jeunes poissons, de « prélever très facilement un petit morceau de nageoire, faire une extraction d’ADN, génotyper l’animal et savoir quel va être son sexe futur », Yann Guiguen, directeur de recherche à l’Inrae.

Actuellement, en pisciculture, les éleveurs « font de l’échographie individuelle, ce qui est extrêmement lourd, avec un taux d’erreur important », rappelle M. Guiguen.

Mais si cette découverte est libre de droits, notamment parce qu’issue de la recherche publique, sa mise en application est pour l’instant plus coûteuse que les méthodes traditionnelles.

« Mais le jour où le test sera moins coûteux et que sa mise en pratique sera plus simple, évidemment, on l’utilisera », assure M. Dulau, qui espère faire grimper la proportion d’esturgeons femelles dans ses bassins « d’ici trois ans, deux ans si on est chanceux ».

Quant aux très jeunes esturgeons mâles, « on les valorisera certainement comme protéines animales », a indiqué M. Dulau, qui a notamment évoqué les croquettes pour chats.

Actuellement, « les deux marchés principaux pour les petits mâles de trois ans, c’est l’aquariophilie et la pêche sportive », a-t-il ajouté.

Une minorité d’esturgeons restera toujours utilisée pour « entretenir les lignées » et assurer la reproduction des élevages.