Alors que se déroulait mardi la Journée québécoise des allergies alimentaires, La Presse s'est entretenue avec l'auteure du nouveau livre Allergique et gourmand, Dominique Seigneur, mère d'une enfant allergique. Son précepte ? Oui, il est possible d'être à la fois allergique... et foodie !

Rester gourmand malgré les contraintes

Dès sa naissance, Victoria, la fille de Dominique Seigneur, montrait des signes d'allergies graves aux produits laitiers, un diagnostic qui s'est confirmé - avec celui d'allergie aux oeufs - lorsqu'elle avait 1 an. À 2 ans, l'allergie aux arachides s'est ajoutée. Celle qui est aussi directrice des communications pour Allergies Québec a décidé d'adopter une approche positive qu'elle met de l'avant dans son livre Allergique et gourmand, qui propose plus de 100 recettes gourmandes et sûres.

Comment avez-vous vécu le diagnostic d'allergies multiples de votre fille sur le coup ?

Ce fut un gros, gros choc ! J'ai pleuré dans le bureau de mon allergologue, je voyais ça comme une fatalité. Et il y a aussi l'anxiété qui se développe, la peur que ma fille fasse une réaction... Je me demandais comment j'allais refaire toute ma vie autour de ça. Dans ma tête, c'était fini, la spontanéité !

Et par la suite ?

Cela m'a pris plusieurs mois à m'adapter à la situation et à rassembler mon énergie. J'ai toujours adoré cuisiner ; ma mère est une cuisinière hors pair et la famille de mon père est française. Donc, passer plusieurs heures par semaine dans ma cuisine, ce n'est pas quelque chose qui me dérange. Alors, j'ai relevé mes manches et j'ai repensé toute ma façon de cuisiner et de faire mon épicerie.

Votre livre présente plus de 100 recettes de votre cru, adaptées pour les personnes allergiques. Comment êtes-vous arrivée à créer des recettes qu'on imagine mal sans oeufs ou produits laitiers comme des pancakes, des muffins anglais ou des gâteaux ?

Disons qu'il y a eu beaucoup d'essais et erreurs et toutes sortes de défis, comme de cuisiner de beaux gâteaux qui lèvent sans oeufs ! J'ai dû tout réessayer, trouver des substituts, mais j'ai fini par me construire une bonne sélection. J'ai adapté plusieurs recettes familiales et je me suis aussi inspirée de recettes végétaliennes pour savoir comment remplacer les oeufs, le lait ou le beurre.

Donc, selon vous, c'est possible d'être un foodie même si on est allergique ?

Oui ! Évidemment, les allergies, c'est tenace, et on n'a pas le choix de s'adapter, car dans la plupart des cas, elles sont là pour rester. Mais je crois que c'est possible d'avoir du plaisir en cuisine, en se concentrant sur ce qu'on peut faire plutôt que sur ce qui est interdit. Avec mon livre, j'ai voulu mettre de l'avant une approche positive et redonner ce moment de plaisir aux gens. De montrer qu'on peut manger de façon saine, de beaux plats, sans que ça soit la même chose tous les jours. De sortir de sa zone de confort, quoi !

Au tour des lunchs !

Marie-Josée Bettez est coauteure du best-seller Déjouer les allergies alimentaires et rédactrice en chef du blogue du même nom. Tout comme Mme Seigneur, elle a changé ses habitudes alimentaires de façon draconienne après la naissance de son fils, Christophe, allergique à plusieurs aliments. Dans son nouvel ouvrage, écrit en collaboration avec son fils qui a aujourd'hui 19 ans, elle s'attarde à un incontournable du quotidien des parents - et particulièrement ceux d'enfants allergiques : les lunchs ! Y sont proposées 90 recettes de lunchs « gourmets et gourmands » avec plusieurs variantes, des menus complets ainsi que des idées de collations pour les personnes allergiques. Le tout afin de permettre à ces dernières de participer à des activités en dehors de la maisonnée en toute quiétude.

Aide-mémoire pour manger en toute sécurité

Vous venez d'apprendre que votre enfant est allergique ou vous recevez une personne souffrant d'allergies à la maison ? Voici quelques points à savoir à propos des allergies.

LES ALLERGÈNES PRIORITAIRES

Bien qu'il existe plus de 200 protéines alimentaires pouvant déclencher une réaction allergique, Santé Canada identifie 10 allergènes prioritaires, qui sont responsables de 90 % des réactions allergiques : arachides, blé, poissons et fruits de mer, lait, moutarde, noix, oeufs, sésame, soya et sulfites.

L'ÉTIQUETAGE AU CANADA

En 2012, un règlement améliorant l'étiquetage des allergènes est entré en vigueur au Canada, rendant obligatoire l'affichage des 10 allergènes prioritaires sur les emballages d'aliments préfabriqués, et ce, à deux endroits : dans la liste des ingrédients et dans une déclaration « contient » distincte. Pour les aliments non emballés ou artisanaux, aucune réglementation n'existe cependant.

LES ALCOOLS

Même si les alcools peuvent contenir des allergènes, la plupart sont exemptées de le déclarer, sauf pour le blé et les sulfites. Pour la bière, malgré la présence de gluten dans la plupart d'entre elles, elles n'ont pas à déclarer les allergènes alimentaires sur leurs étiquettes. Il faut être particulièrement vigilant avec les spiritueux, qui sont souvent faits avec des grains et des céréales, comme la vodka, avec des noix, comme pour l'amaretto ou le frangelico, ou qui contiennent de la crème. On fait également attention aux sauces et aux recettes qui contiennent de l'alcool !

LES HUILES

Les huiles sont des aliments transformés : on transforme une huile brute en produit comestible en éliminant les impuretés, que ce soit par pression à froid ou par des procédés industriels comme le chauffage à haute température, qui produit une huile raffinée. Dans ce dernier cas, la protéine peut être transformée au point où elle est imperceptible, ce qui fait que le règlement sur l'étiquetage de Santé Canada ne vise pas ce type de produits. Mais la protéine pourrait subsister dans les huiles pressées à froid ou non raffinées. Dans tous les cas, Allergies Québec recommande de parler avec son allergologue avant de consommer une huile dérivée d'un aliment auquel on est allergique.

CONTAMINATION CROISÉE

Selon Dominique Seigneur, auteure du livre Allergique et gourmand, la contamination croisée est largement sous-estimée et mal comprise. Des ustensiles qui vont servir d'un plat à l'autre dans un buffet à la grille du BBQ qui porte des traces de noix ou de produits laitiers, il existe de nombreux risques de contamination croisée. La meilleure façon de les éviter ? Bien connaître son environnement et être conscient des dangers. Quant aux usines - où la contamination croisée survient fréquemment -, la mention « peut contenir » n'est pas régie au Canada. En cas de doute, le mieux est de communiquer avec le fabricant.

EXCLURE LES ALLERGÈNES ?

Dans une maisonnée où tous ne sont pas allergiques, la question d'exclure ou pas les allergènes de l'environnement est un choix qui doit être discuté en famille. Si certains optent pour un environnement 100 % sans allergènes, d'autres font le choix qu'ils restent dans la maison. L'important étant de créer un environnement « favorable et sécuritaire », croit Mme Seigneur, qui a fait le choix de garder produits laitiers et oeufs chez elle. « Ma fille a son étage dans le frigo, son endroit dans l'armoire, ses étiquettes », énumère-t-elle.

Recette: granola tout naturel

Une recette maison de granola sans noix, arachides, sésame, produits laitiers ou oeufs, mais quand même délicieux. Création de Dominique Seigneur. Donne 1,5 kg (12 tasses).

INGRÉDIENTS



• 500 g (5 tasses) de flocons d'avoine

• 20 g (1 tasse) de quinoa soufflé

• 250 g (2 tasses) de carottes râpées

• 150 g (1 tasse) de graines de citrouille grillées

• 50 g (1/4 de tasse) de graines de lin (facultatif)

• 100 g (1 tasse) de flocons de noix de coco ou de noix de coco râpée non sucrée

• 250 ml (1 tasse) de sirop d'érable ou de miel

• 85 ml (1/3 de tasse) d'huile de noix de coco

• 1/2 c. à café de sel

• 2 c. à café d'extrait de vanille pur

• 2 c. à café de cannelle moulue

• 1 c. à café de gingembre moulu

• 1 c. à café de cardamome moulue

• 1/2 c. à café de bicarbonate de soude

• 350 g (2 tasses) de fruits séchés (raisins, abricots, canneberges, cerises, mangues, dattes ou pommes) coupés en dés

• 145 g (1 tasse) de brisures de chocolat noir (facultatif)

MÉTHODE

Préchauffer le four à 160 °C (325 °F). Tapisser une plaque de cuisson de papier parchemin.

Dans un grand bol, mélanger l'avoine, le quinoa, les carottes, les graines de citrouille, les graines de lin et les flocons de noix de coco. Réserver.

Dans une petite casserole, à feu moyen-doux, cuire le sirop d'érable, l'huile de noix de coco et le sel jusqu'à ce que le mélange soit chaud et liquide. Baisser le feu, ajouter la vanille, la cannelle, le gingembre, la cardamome et le bicarbonate de soude. À l'aide d'une cuillère en bois, mélanger pendant quelques secondes, jusqu'à ce que la préparation soit homogène. Verser le mélange chaud sur les ingrédients secs. À l'aide d'une cuillère en bois, remuer délicatement.

Étaler le mélange sur la plaque préparée et cuire au four de 30 à 40 minutes en prenant soin de remuer le mélange à mi-cuisson.

Ajouter les fruits séchés à la sortie du four et, à l'aide d'une cuillère en bois, bien les incorporer. Lorsque le mélange est refroidi, ajouter les brisures de chocolat, si désiré, et mélanger.

Ce granola se conserve 2 semaines à la température ambiante, dans un contenant hermétique.