Liudmila Terzi importe du vin depuis plusieurs années, mais la femme d’affaires, originaire de Moldavie, rêvait d’en produire. Elle a longtemps cherché un vignoble en Europe, mais son choix s’est arrêté sur une tout autre région : le Québec. Son conjoint et elle viennent d’acheter le vignoble Beauchemin, en Mauricie, et ils ont de grandes ambitions.

Même en plein hiver, Liudmila Terzi quitte tous les matins la Rive-Sud de Montréal pour se rendre dans ses vignes à Yamachiche. « On enfile nos raquettes et on fait le tour du vignoble, raconte la nouvelle vigneronne. On s’assure que tout est bien protégé en attendant le printemps. »

Liudmila Terzi a grandi entourée de vignes en Moldavie. Sa famille, comme la plupart des autres du village de Gotești où elle a grandi dans le sud du pays, possède une petite parcelle d’un hectare. Les vendanges, la vinification et la dégustation, elle connaît. Ainsi, lorsque la jeune femme est arrivée au Québec en 2009, le goût du vin moldave, produit avec les cépages locaux, lui a vite manqué.

Ingénieure de formation, Mme Terzi a fondé son agence d’importation nommée Les Filles du Vigneron en 2018 afin de commercialiser le vin moldave dans la province. Or, la femme d’affaires voulait aussi en produire.

PHOTO TATIANA PRIJILEVSKY, FOURNIE PAR LE VIGNOBLE BEAUCHEMIN

Liudmila Terzi, propriétaire du vignoble Beauchemin

Ses recherches se sont d’abord concentrées dans son pays natal. « Le climat du Québec me faisait peur, dit-elle. En Moldavie, les vignes ne souffrent pas du froid comme ici. On n’a pas besoin de les couvrir non plus. »

Or, la pandémie puis la guerre en Ukraine ont freiné le projet d’acheter un vignoble de l’autre côté de l’Atlantique.

Comme ce fut le cas pour de nombreux Québécois, le temps d’arrêt imposé par la pandémie lui a permis de découvrir les vins locaux. Son intérêt l’a amenée à travailler dans le vignoble de la Bauge, à Brigham, ainsi qu’au domaine du Fleuve, à Varennes. Ces expériences lui ont fait changer d’avis sur le potentiel viticole d’ici.

« J’ai réalisé qu’on a besoin d’être sur place pour que le projet fonctionne, indique Liudmila Terzi. Avec la distance, j’aurais travaillé à réaliser le rêve de quelqu’un d’autre. »

Voir grand

La nouvelle vigneronne observe le vin blanc qui tourne dans son verre avec fébrilité. Bien que son conjoint et elle soient officiellement propriétaires du vignoble Beauchemin depuis décembre, Liudmila Terzi a participé à la production des cuvées 2022. Cet assemblage de frontenac blanc, louise swenson, osceola muscat et vidal est le fruit de son travail.

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Liudmila Terzi, propriétaire du vignoble Beauchemin

Il y a beaucoup de potentiel. Les vignes sont matures, le sol est neutre et le lac Saint-Pierre nous apporte beaucoup de neige en hiver. Ça protège le vignoble.

Liudmila Terzi, à propos du vignoble Beauchemin

Toutefois, ces précipitations tombent en pluie une fois l’été de retour et elles augmentent le risque de maladies dans le vignoble. Comme le domaine est en conversion vers l’agriculture biologique, les moyens pour traiter sont plus limités. Or, la vigneronne ne se laisse pas décourager. Elle prévoit même ajouter au vignoble fondé en 2010 deux nouvelles parcelles au printemps.

Le vignoble Beauchemin n’était pas ouvert au public, mais la situation va changer l’été prochain. Les bâtiments agricoles qui étaient en mauvais état seront rénovés. La femme d’affaires compte bien profiter de la proximité avec le chemin du Roy et l’autoroute 40 pour attirer les amateurs de vin.

« On travaille tellement fort, on veut le partager avec les gens et qu’ils aient une belle expérience. »

En contemplant les vignes de chardonnay et de vidal endormies sous la neige, la vigneronne n’oublie pas ses racines. Elle travaille pour que le saperavi, un cépage géorgien très répandu en Moldavie, et le codrinschi, un croisement de cabernet sauvignon et de rara neagra, soient autorisés au Canada. Elle pourra ainsi ajouter une touche moldave au vin québécois.

Rouge d’ici

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Vignoble Beauchemin vin rouge 2020

Le fondateur du vignoble, Luc Beauchemin, a accumulé une solide expérience dans le domaine du vin avant de démarrer son vignoble en 2010. Après trois années en bouteille, son rouge 2020, un assemblage de cépages hybrides, radisson, chambourcin, marquette et frontenac noir, est toujours aussi bon. Les notes de mûres et de cerises sont invitantes. L’attaque est souple et l’acidité est équilibrée. La finale épicée est longue et juteuse. Parfait pour la fondue.

Vignoble Beauchemin vin rouge 2020, 19,25 $

Grand chardonnay

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Vignoble Beauchemin Chardonnay 2021

C’est en goûtant le chardonnay de Luc Beauchemin que Liudmila Terzi a vu le potentiel du vignoble. Les vignes n’ont même pas encore 10 ans, mais déjà la qualité du vin est au rendez-vous. Et la cuvée 2021 est encore meilleure ! L’été a été chaud et ça se goûte. Les parfums de poire et de fleurs remplissent le verre. La texture est subtilement crémeuse et l’attaque saline amène beaucoup de longueur.

Vignoble Beauchemin Chardonnay 2021, 36 $

Les points de vente : William J. Walter à Québec (Saint-Roch), La Boîte à vins, IGA Express Rosemère, Le Vinologue. Dans certains restaurants : L’Imposteur, Maison Boulud, Bar à vin Liège.

Consultez le site du vignoble Beauchemin