La Presse a demandé à sa collaboratrice, la sommelière de réputation internationale Véronique Rivest, de déguster en primeur un champagne de la maison Krug, un produit d’une rare qualité.

Le monde du vin est incroyablement vaste et varié. C’est pourquoi il me fascine tant. Les découvertes ne cessent jamais et il alimente mon immense curiosité. Certains pourraient croire qu’on a tout vu, tout goûté, que plus rien ne nous impressionne. Tout au contraire ! Le vin continue de me fasciner parce qu’il continue de m’émouvoir. Le plaisir simple et gourmand que procure un bon vin de tous les jours, honnête et bien fait. L’excitation suscitée par un vin qui nous transporte ailleurs grâce à son expression juste et singulière d’un lieu. Puis, l’émerveillement et l’émotion que procure un très grand vin, quand l’art se fond à la technique et aux traditions.

Un grand terroir est la pierre d’assise de tout grand vin, mais il exige aussi une attention obsessive aux moindres détails, à la vigne comme au chai, que seule une passion profonde pour son métier peut justifier. Son élaboration est alors un véritable travail d’orfèvre, où aucun compromis n’est toléré. Bien sûr, son prix le reflète, mais on ne peut qu’être admiratif devant un tel souci du détail. J’étais à la fois excitée et émue à l’idée de m’immerger, ne serait-ce que quelques instants, dans le fabuleux monde de Krug.

On associe d’emblée le champagne au monde du luxe. Il est le vin des rois, des vedettes et des célébrités. Celui des célébrations et des grandes occasions. Les sportifs victorieux s’en aspergent et on en fracasse une bouteille sur la coque des navires pour les baptiser.

Le champagne est en soi un vin exceptionnel. Le plus simple des vins blancs peut se retrouver sur les rayons quelques mois après les vendanges. Le plus simple des champagnes nécessitera plus de deux ans, car son élaboration est beaucoup plus longue et complexe. Mais, je le répète souvent, une appellation n’est malheureusement pas une garantie de qualité : il y a du bon et du moins bon partout, et la Champagne n’y échappe pas. Certains vins sont élaborés dans un esprit purement mercantile, d’autres se rapprochent de l’art.

La patience prime

PHOTO PATRICK WOODBURY, LE DROIT

La Grande Cuvée est le champagne emblématique de la maison Krug.

La maison Krug a été fondée en 1843 par Joseph Krug, avec une vision très claire : ne produire que des cuvées de prestige. La maison est aujourd’hui dirigée par la sixième génération et est reconnue dans le monde entier pour ses champagnes d’exception.

Tous les ans, environ 250 vins clairs (tranquilles, sans bulles) sont goûtés à plusieurs reprises par Julie Cavil, chef de cave, et son équipe. Ensuite, ils goûtent 150 vins de réserve : ce sont les vins clairs conservés chaque année pour bâtir une librairie de vieux vins. Pour un champagne non millésimé, l’assemblage est généralement basé sur la plus récente récolte, avec un peu de vins de réserve. Pour la Grande Cuvée de Krug, les vins de réserve représentent de 30 à 50 % de l’assemblage.

Les dégustations terminées, plus d’une centaine de vins, issus de 8 à 10 années différentes, sont retenus pour élaborer la nouvelle cuvée. Cet assemblage est mis en bouteilles pour la prise de mousse et le vieillissement. Cet élevage, légalement de 15 mois minimum, est d’environ 7 ans pour la Grande Cuvée. Chaque édition est différente, mais elles ont toutes cette fabuleuse combinaison de richesse et d’élégance. Elles font preuve d’ampleur, mais aussi d’éclat, portées par des bulles d’une finesse extrême.

La première chose qu’on apprend chez Krug, c’est la patience. Alors que la plupart des champagnes non millésimés sont assemblés à partir de dizaines de vins de base, chez Krug, on parle de centaines.

Julie Cavil, chef de cave de Krug

Comme pour une symphonie, le but n’est pas de faire disparaître chaque instrument, mais de créer un tout plus riche, plus nuancé, plus complexe. C’est dans cet esprit que s’inscrit le champagne emblématique, la Grande Cuvée : une véritable symphonie, un tout beaucoup plus complexe que la somme de ses parties.

Les détails changent tout

PHOTO PATRICK WOODBURY, LE DROIT

Notre collaboratrice apprécie le nez riche et délicat à la fois, empreint d’une foule de détails aromatiques.

La 169édition, basée sur le millésime 2013, offre un nez riche et délicat à la fois, empreint d’une foule de détails aromatiques : poire, amande, noisettes, agrumes, foin. Une véritable symphonie d’arômes en bouche, une texture riche, mais aussi tellement d’éclat, de fraîcheur et d’élan. Beaucoup de profondeur, tout autant de subtilités, et une très longue finale qui allongent les arômes. Comme une note de musique qui ne finit plus.

Je crois sincèrement que le plaisir croît avec la connaissance. Plus on en sait sur un domaine, les vignerons, leur histoire, leur vision et leur travail, plus notre appréciation du vin s’en trouve enrichie. Comme pour toute œuvre d’art ! Et ça vaut pour tous les vins qui sont faits dans les règles de l’art, pas que les grands. Goûter de très grands vins reste une occasion rare. Mais goûter aux plaisirs que procure un bon vin, en s’immergeant dans son histoire, ça, c’est accessible à tous.

La 168e édition du champagne Grande Cuvée de Krug est en vente à la SAQ et la 169e édition arrivera l’automne prochain.

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