Les photos de choux à la crème décadents et de macarons colorés tapissent les réseaux sociaux. Ces délices sont l’œuvre de professionnels, mais aussi d’amateurs sérieux, qui consacrent leurs week-ends à la pâtisserie. « On cuisine pour se nourrir, mais on pâtisse pour se faire plaisir », résume l’ingénieur Karel Lysy, qui fait partie des nouveaux mordus de pâtisserie.

Le plaisir de pâtisser

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Karel Lysy fait de la pâtisserie plus sérieusement
depuis six ou sept ans.

Un chou chocolat-noisette – avec praliné coulant – et un galet de pécan coiffé d’une mousse vanille : voilà ce que Karel Lysy, un pâtissier délicieusement doué, a préparé au cours d’un récent week-end. Détail : Karel Lysy est… ingénieur. C’est à la fin de la vingtaine, comme loisir, qu’il a commencé à pâtisser.

Pourquoi faire de la pâtisserie ? « J’aime en manger ! », répond-il. S’il y a des pâtisseries qui lui plaisent à Montréal – il nomme Patrice Pâtissier, la Maison Christian Faure, la Pâtisserie Madeleine et Westrose –, « il y en a moins qu’à Paris, poursuit-il. Avec Instagram, on voit plein de pâtisseries d’ailleurs et on a envie d’y goûter ».

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Sa solution : se retrousser les manches. « J’aime faire de la pâtisserie ; il y a un côté technique qui me plaît », dit-il. Abonné à la revue française Fou de pâtisserie, Karel Lysy suit des cours spécialisés (notamment avec Patrice Demers et même avec Christophe Michalak, en France) et participe avec brio à des concours culinaires, notamment de macarons. « J’aime le thrill, dit-il. C’est sympathique. »

Célébrer 20 ans de pâtisserie

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Les vendredis soir, Patrice Demers offre dans sa boutique
de la Petite-Bourgogne des ateliers de pâtisserie, suivis
par une douzaine d’amateurs.

« Présentement, avec Instagram et les réseaux sociaux, beaucoup de gens se lancent en pâtisserie », confirme Patrice Demers, qui célèbre cet automne ses 20 ans comme pâtissier (ultra) professionnel. Les vendredis soir, le pâtissier offre dans sa boutique de la Petite-Bourgogne des ateliers, suivis par une douzaine d’amateurs attentifs à la fois. Parmi les plus populaires ? Ceux sur les desserts au chocolat, aux agrumes et la pâte à choux. Même s’ils se débrouillent en cuisine, les gens « ont l’impression, avec raison, qu’ils doivent avoir plus de techniques pour les desserts », observe le pâtissier.

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Sachets de mélilot séché, pectine, agar-agar, vanille, etc. Patrice Demers vend les ingrédients utiles aux pâtissiers amateurs

Lui-même n’a pas fait de gâteaux quand il était enfant à Laval. « Ma mère cuisine bien, mais il y avait peu de desserts à la maison », se souvient Patrice Demers, qui aura 40 ans en janvier. C’est à l’adolescence qu’il a commencé à être fasciné par les restaurants et la cuisine. Comme il le raconte dans son nouveau livre Parcours sucré, dont la sortie est prévue le 16 octobre, un hasard de la vie l’a mené à s’inscrire en pâtisserie à l’école hôtelière – le cours de cuisine était complet… « Ce parcours-là m’a servi, puisque pour moi, c’est avant tout le goût qui prime, souligne-t-il. Bien avant le look. Ce n’est pas toujours le cas en pâtisserie française. »

Dans Parcours sucré, Patrice Demers présente des chefs et des artisans qui l’ont inspiré au fil des ans, en plus d’une centaine de recettes. « Souvent, les pâtissiers ont la réputation de cacher leurs recettes, de garder leurs secrets, indique-t-il. C’est encore vrai en Europe. » Ce n’est pas son cas ? « Pas du tout, répond-il. Je pense que c’est en donnant nos recettes qu’on peut donner le goût au monde d’en faire. Et souvent, les gens qui font beaucoup de pâtisseries en consomment aussi beaucoup, parce qu’ils aiment ça… »

La Maison Christian Faure offre aussi des cours de pâtisserie pour « amateurs sérieux », donnés les samedis de 9 h 30 à 15 h 30. « Nous souhaitons que le stagiaire bénéficie d’une formation digne d’un professionnel, pour avoir un résultat vendable », précise Cécile Quéré, de la Maison Christian Faure.

Ne penser à rien d’autre

PHOTO AURÉLIE MIQUEL, FOURNIE PAR ANNE-SOPHIE VIDAL

En France, Anne-Sophie Vidal a poussé loin sa passion
en remportant le concours télévisé amateur Le meilleur pâtissier
sur la chaîne M6, en 2014.

Pour Chantal Lesieur, de Sainte-Adèle, pâtisser signifie s’évader. « J’aime le fait que c’est plus complexe que de faire un repas, explique l’amatrice. En te concentrant sur un dessert, tu ne penses à rien d’autre. Tu oublies tout. Ça fait du bien ! Ça fait aussi plaisir aux gens. » Chantal Lesieur parle avec passion de mascarpone parfumé à la vanille, de chantilly au chocolat Biskélia et de mélilot, une plante sauvage du Québec dont les fleurs séchées peuvent parfumer les desserts.

En France, Anne-Sophie Vidal a poussé loin sa passion en remportant le concours télévisé amateur Le meilleur pâtissier sur la chaîne M6, en 2014. Sa formation ? Elle l’a reçue dans une école de commerce ! Depuis, la jeune mère est devenue styliste culinaire. Elle continue de « créer des recettes simples et accessibles, que les gens qui [la] suivent vont vraiment pouvoir refaire chez eux », explique-t-elle.

Son plus récent livre, Les pâtisseries d’Anne-Sophie, est distribué au Québec. « La cuisine répond à un besoin physiologique, ça peut même devenir une corvée quand on n’a pas d’idées et que ça se répète tous les jours, convient-elle. La pâtisserie a une dimension festive et de partage. On ne cherche pas à nourrir avec des gâteaux, on est vraiment dans la dimension du plaisir. Et tous les pâtissiers en herbe le savent, celui qui apporte le gâteau est toujours la star de la soirée. »

Conseil de Patrice Demers

Munissez-vous d’une balance numérique (et rangez vos tasses à mesurer), conseille Patrice Demers. « En pâtisserie, une balance numérique, c’est un must, affirme-t-il. Ça n’a aucun sens de mesurer du beurre froid dans une tasse. C’est tellement plus simple avec une balance ! Nous pesons tout, même les liquides : c’est vraiment plus efficace. »

Plongée dans l’histoire de la pâtisserie française

Une conférence gourmande (avec café et surprises) sur l’histoire de la pâtisserie française aura lieu demain à 10 h, au musée Pointe-à-Callière de Montréal. Le pâtissier Christian Faure, élu Meilleur ouvrier de France, et Julia Csergo, spécialiste des cultures et des patrimoines alimentaires, vont partager leurs connaissances avec le public. Nous avons visité l’exposition À table ! Le repas français se raconte pour vous mettre en bouche.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Christine Dufresne, chargée de projet, tient ici une tour de (faux) macarons.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

C’est à la Renaissance que le goût du sucre s’est développé en France. Ce délice était toutefois réservé aux élites, car il coûtait cher. Au XVIIIe siècle, le sucre était conservé sous forme de pierre, qu’il fallait hacher. Qui a dit que manger sucré n’était pas un sport ? Sur cette photo : fer à beignets à tête interchangeable et hache à casser le sucre, XVIIIe siècle.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

« Les premières pâtisseries étaient les brioches et les gnoles, qui sont des pâtisseries charcutières, pour enrober les pâtés, explique Christian Faure, qui a notamment œuvré au palais princier de Monaco. Le pâtissier était appelé le gnoleux. »

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

La grand-mère de Christian Faure avait un gaufrier pour faire cuire les gaufres dans l’âtre – on était alors loin des Eggo ! M. Faure est originaire de Villefranche-sur-Saône, en France. Sur cette photo : rouleau à pâtisserie qui imprime des motifs, casse-noisette en forme de crocodile et gaufrier en fer du XVIe siècle ; saupoudreuses de sucre des XVIIe et XVIIIe siècles.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Il a fallu attendre que l’usage du beurre se répande, aux XVIIe et XVIIIe siècles, pour que la pâtisserie française se développe. Sur cette photo : moules pour gâteaux cannelés en cuivre, fer et laiton du XVIIIe siècle et moule de confiseur en étain.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Né en 1784 à Paris, Marie-Antoine Carême a eu une destinée hors du commun : d’abord enfant des rues, il est devenu le cuisinier (et pâtissier) des rois. « Aujourd’hui, on parle de Wow effect, observe Christian Faure, mais à l’époque, quand vous entriez dans une salle de réception, vous voyiez des chefs-d’œuvre. » Carême était un maître de la pâtisserie architecturale.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Rapportées du Mexique par les conquistadors espagnols au XVIe siècle, les fèves de cacao ont permis aux nobles de découvrir le chocolat. « Il a d’abord été consommé liquide », rappelle Christian Faure. Anecdote : pour les dames, il était d’un grand chic d’assortir tasse et tenue. Sur cette photo : trembleuses (gobelet et soucoupe enfoncée) en porcelaine du XVIIIe siècle, chocolatière et moussoir en argent, bois et ivoire teinté du début du XXe siècle.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Saut dans le temps vers le XXe siècle. « Quand on part en pique-nique, on apporte un gâteau de voyage », explique Christian Faure. C’est typiquement un cake aux fruits, un gâteau basque ou breton. « Quelque chose d’assez riche, qui nous tient au ventre », précise-t-il. Sur cette photo : nécessaire de pique-nique Hermès, XXe siècle.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Ce carré de soie Pâtisserie française fait partie de la collection automne-hiver 2019 de Hermès. Le dessinateur Pierre Marie en a eu l’idée en feuilletant Le livre de pâtisserie, publié en 1873 par Jules Gouffé, le fils d’un pâtissier célèbre pour ses pièces montées. On y trouve timbales de pâte d’amande, croquembouches de pistaches, socles ornementés, sucres colorés et autres douceurs.

Financiers érable et sarrasin de Patrice Demers

« C’est un bon exemple de pâtisserie française adaptée avec des produits du Québec », dit Patrice Demers, avant de préparer sous nos yeux ses savoureux financiers à l’érable et au sarrasin. Quand un chef étranger est de passage chez Patrice Pâtissier, c’est un des premiers gâteaux que l’équipe lui fait goûter.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Préparation : 20 minutes
Cuisson : 15 à 20 minutes
Temps de repos : 3 heures
Rendement : 8 portions

Ingrédients

– 115 g (1/2 tasse) de beurre non salé
– 215 g (1 3/4 tasse) de sucre d’érable fin
– 72 g (3/4 de tasse) de poudre d’amandes
– 72 g (1/2 tasse) de farine de sarrasin
– 3 g (1/2 c. à thé) de sel
– 180 g (6 unités) de blancs d’œufs
– 62 g (1/4 de tasse) d’huile de canola

Préparation

1. Dans une casserole à rebord élevé, cuire le beurre à feu moyen pendant 2 minutes. Dans un premier temps, le beurre va fondre et son eau va s’évaporer. Lorsque la vapeur et le crépitement cesseront, c’est le signe que toute l’eau s’est évaporée. C’est à ce moment qu’il faut rester attentif, parce que le beurre commencera à colorer. « J’aime bien brasser le beurre avec un fouet pendant la cuisson pour éviter que les solides se déposent au fond de la casserole et brûlent », explique Patrice Demers. Pour s’assurer que le beurre est suffisamment cuit et éviter de passer tout droit, verser le beurre dans une tasse à mesurer transparente, qui résiste à la chaleur, ou dans un bol pour vérifier la couleur. On cherche à obtenir une couleur caramel. S’il n’est pas assez foncé, le remettre dans la casserole et poursuivre la cuisson quelques secondes de plus. Lorsqu’il est prêt, le passer au tamis fin pour retirer les solides.

2. Dans un grand bol, mélanger tous les ingrédients secs.

3. Verser les blancs d’œufs sur les ingrédients secs et, à l’aide d’un fouet, bien mélanger pour obtenir une pâte parfaitement lisse.

4. Ajouter l’huile de canola, puis le beurre (encore chaud) en mélangeant doucement au début pour éviter les éclaboussures. Mélanger jusqu’à ce que la pâte soit bien homogène.

5. Verser la pâte dans un bol, couvrir de pellicule plastique et mettre au réfrigérateur pendant au moins 3 heures.

6. Préchauffer le four à 180 °C (350 °F). Beurrer de petits moules à financiers en silicone ou des barquettes en papier.

7. Verser la pâte dans les moules et cuire au four pendant 15 à 20 minutes ou jusqu’à ce que les financiers soient bien dorés.

8. Laisser tempérer de 20 à 25 minutes avant de démouler.

Source : Parcours sucré, de Patrice Demers, aux Éditions La Presse.

IMAGE FOURNIE PAR LES ÉDITIONS LA PRESSE

Parcours sucré, de Patrice Demers, paraîtra le 16 octobre aux Éditions La Presse

Le clafoutis d’Anne-Sophie

Voici le clafoutis – un dessert typiquement français – en version Anne-Sophie. « On peut le faire avec des cerises congelées, précise-t-elle. Dans ce cas, il faut bien les décongeler et les égoutter avant, mais cela aura beaucoup moins de goût qu’avec des cerises fraîches. Si c’est encore la saison au Canada, vous pouvez sinon les remplacer par des prunes coupées en quatre. »

Temps de préparation : 15 minutes
Temps de cuisson : 25 minutes

PHOTO AURÉLIE MIQUEL, FOURNIE PAR LES ÉDITIONS MARABOUT

Ingrédients

Pour un moule de 27 cm de diamètre (8 personnes)

– 1 kg de cerises
– 80 g de beurre
– 4 œufs
– 100 g de sucre
– 200 g de farine
– 100 g de lait
– 3 c. à soupe de kirsch (ou d’amaretto)
– 1 sachet de sucre vanillé nappage neutre (ou 1 sachet de nappage pour tartes)

Préparation

Cerises

Préchauffez le four à 170 °C (340 °F). Lavez et dénoyautez les cerises. L’idéal est d’utiliser un dénoyauteur pour conserver les cerises intactes et vous faciliter la tâche ; sinon, utilisez un petit couteau fin et coupez-les en 2, puis enlevez le noyau. Vous avez dénoyauté la bonne quantité de cerises quand elles remplissent l’intégralité du fond de votre moule.

Appareil

1. Faites légèrement fondre le beurre. Dans un saladier, battez les œufs et le sucre. Ajoutez la farine (tamisée, pour éviter les grumeaux), le lait, le beurre fondu et le kirsch.

2. Beurrez légèrement le moule. Si vous souhaitez démouler le clafoutis, répartissez les cerises au fond, puis versez la pâte dessus. Si vous souhaitez présenter le clafoutis directement dans son moule, versez la pâte et répartissez les cerises dessus.

3. Saupoudrez le tout de sucre vanillé, puis enfournez à 170 °C pendant 25 minutes, jusqu’à ce que le dessus de votre clafoutis aux cerises soit bien doré. Laissez refroidir 15 minutes avant de déguster.

Source : Les Pâtisseries d’Anne-Sophie, d’Anne-Sophie Vidal, éditions Marabout

IMAGE FOURNIE PAR LES ÉDITIONS MARABOUT

Les Pâtisseries d’Anne-Sophie,
 d’Anne-Sophie Vidal, éditions Marabout