L'enfouissement d'une «montagne d'ordures» en mer près de Beyrouth en vertu d'un accord entre le gouvernement et une compagnie privée fait scandale au Liban, théâtre depuis deux ans d'une crise des déchets sans précédent.

Depuis une dizaine de jours, des collectifs de la société civile font circuler des images de plusieurs camions transportant des déchets et les déversant dans la mer, une opération toujours en cours.

D'après ces collectifs, ces déchets proviennent d'une «montagne d'ordures» à Borj Hammoud, banlieue nord de Beyrouth et sont enfouis en Méditerranée en vertu d'un accord entre le Conseil de développement et de la reconstruction (CDR, organe gouvernemental) et une compagnie privée.

«Ils sont en train de prendre de cette montagne des déchets qui sont là depuis 20 ans (...) et les jettent en mer», s'indigne Wadih al-Asmar, militant au sein de «Vous puez», le collectif qui a été à l'origine des manifestations contre la crise des ordures qui a éclaté en 2015.

Ce collectif, ainsi que celui de «la santé de nos enfants est une ligne rouge», ont dénoncé sur leur page Facebook un «massacre environnemental».

La polémique a enflé mardi avec des déclarations du ministre de l'Environnement qui a confirmé lors d'une tournée sur place que le «contrat entre l'entrepreneur et le CDR stipulait l'enfouissement de la montagne (de déchets) dans la mer».

Il a indiqué avoir envoyé des lettres au CDR en vue de «rectifier certaines choses» et qu'il allait s'enquérir du «meilleur moyen pour limiter» les dégâts.

Mais les militants de la société civile ont laissé éclater leur colère mardi sur les réseaux sociaux, qualifiant la situation de «honteuse».

«Des déchets sont jetés en pleine mer et le ministre de l'Environnement justifie cela (...) il leur donne le feu vert», s'indigne «Vous puez».

«Ils jettent ces ordures sans traitement. Ils tuent l'écosystème maritime», s'insurge encore M. Asmar.

Le Liban a connu à l'été 2015 une crise des déchets aiguë, avec des ordures s'accumulant dans les rues de Beyrouth et de ses environs depuis la fermeture de la principale décharge du pays.

Cette crise a donné lieu à des manifestations sans précédent de la société civile qui a exprimé son ras-le-bol de la classe politique, dans un pays souffrant depuis la fin de la guerre civile (1975-1990) d'institutions bancales et de corruption endémique.

En 2016, le gouvernement a décidé de rouvrir cette décharge et de créer deux autres dépotoirs, dont un à Borj Hammoud, à côté duquel se trouve «la montagne d'ordures» qui dégage des odeurs nauséabondes dans les banlieues nord de la capitale.