Un rapport publié mardi par des organisations de défense des droits de l'Homme et de protection de l'environnement dénonce les «fausses affirmations» du géant pétrolier anglo-néerlandais Shell sur l'étendue de ses activités de dépollution dans le delta du Niger.

Amnesty International et le Centre pour l'Environnement, les droits de l'Homme et le développement (CEHRD), basé au Nigeria, accusent Shell de n'avoir pas suivi les recommandations du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) qui avait établi en 2011 l'étendue et l'impact de la pollution pétrolière dans l'Ogoniland, une région au coeur du delta.

L'enquête estimait que cette pollution pourrait nécessiter la plus grande opération de nettoyage au monde et durer 25 à 30 ans, appelant industrie pétrolière et gouvernement nigérian à y participer à hauteur d'un milliard de dollars.

Des décennies de production pétrolière ont rempli les poches d'importants responsables gouvernementaux et généré des profits énormes pour des compagnies comme Shell, mais causé une pollution si vaste qu'elle interdit de pêche et de culture les habitants de la région.

Dans une lettre, la branche nigériane de Shell a récusé les affirmations du rapport, expliquant avoir «commencé à agir sur toutes les recommandations qu'on lui a faites».

Ce rapport est publié une semaine avant le 20e anniversaire de l'exécution de l'écrivain Ken Saro-Wiwa, pendu le 10 novembre 1995 pour le meurtre de personnalités ogonies, qui avait alerté l'opinion mondiale sur les désastres écologiques liées au pétrole dans cette région où la population locale vit principalement de la pêche et de l'élevage.

Selon le rapport de 38 pages, intitulé «Nettoyez: Les fausses affirmations de Shell sur ses réponses aux fuites de pétrole dans le delta du Niger», la plupart des recommandations du PNUE n'ont pas été suivies.

Sur les 15 zones visitées entre juillet et septembre 2015, 13 sont encore «polluées de manière visible» ou contaminées, contrairement à ce qu'affirment Shell et le gouvernement nigérian.

Les auteurs accusent également l'Agence nationale de détection et de réponse aux fuites de pétrole de classer des zones comme étant propres alors qu'elles ne le sont pas.

Shell s'est retiré de l'Ogoniland en 1993 à cause des violences dans cette région mais y gère toujours des oléoducs, considérés par les militants écologistes comme vieux, mal entretenus et à l'origine de fuites fréquentes.

Mais la Shell Petroleum Development Company of Nigeria a assuré être «impliquée dans l'application du rapport du PNUE» affirmant avoir «toujours et de manière publique rapporté (ses) actions sur cette affaire et souligné les défis actuels concernant les vols de pétrole brut et le raffinage illégal».