Une nouvelle recherche suggère que tout type de déversement de pétrole significatif dans l'ouest de l'Arctique canadien se répandrait rapidement et envahirait les eaux autour de l'Alaska, et peut-être aussi loin qu'en Russie.

«Les déversements provenant de la mer canadienne de Beaufort et provoquant un mazoutage des côtes pourraient devenir un enjeu international», affirme le rapport réalisé par RPS Applied Science Associates, une firme internationale de consultants en environnement.

La recherche, financée par le Fonds mondial pour la nature (World Wildlife Fund Canada), a été rendue publique alors que l'Office national de l'énergie (ONE) se prépare à étudier des scénarios de prévention dans le cadre de deux projets distincts d'exploration pétrolière dans la mer de Beaufort.

«La nécessité d'obtenir cette information est très urgente», a déclaré David Miller, du Fonds mondial pour la nature. «L'Office national de l'énergie se penche sur ces questions en ce moment. Des décisions sont en train d'être prises.»

Les consultants ont établi 22 scénarios différents de déversement majeur dans cette région maritime située sur la côte des Territoires du Nord-Ouest.

Les scénarios comprennent notamment un déversement de carburant ou de pétrole provenant d'un bateau-citerne, un déversement provenant d'un oléoduc et des fuites provenant d'un puits en eaux peu profondes ou en haute mer. Les scénarios ont été étudiés en fonction des différentes périodes de l'année, de la durée et de l'ampleur d'un déversement, de même que selon le type de nettoyage et sa durée.

Les modèles ont été établis en fonction des plus récentes données sur la glace, la température et les courants océaniques dans la région. Les estimations de la taille probable des déversements et de l'efficacité des mesures de nettoyage se basent sur les informations utilisées par l'industrie.

Les consultants ont déterminé que dans tous les cas, il y aurait jusqu'à 50 % de risques qu'un déversement de pétrole se répande jusqu'en Alaska. Il y aurait jusqu'à 10 % de risques que le pétrole - sous la forme d'une nappe de pétrole en surface, de poches de pétrole disséminées sous la glace ou de boules de goudron dispersées - dérive jusqu'aux eaux territoriales russes, dans la mer des Tchouktches.

En cas de déversement, il est presque certain que le pétrole se répandrait au-delà des frontières internationales, affirme le rapport. Il y aurait 25 % de risques qu'un déversement touche la Russie. Cette probabilité ne changerait pas beaucoup avec des mesures de nettoyage impliquant des dispersants chimiques, bien que l'ampleur de la nappe de pétrole serait moins grande.

Une contamination pétrolière sous la surface risquerait très probablement d'atteindre l'Alaska, estiment les auteurs du rapport.

«Il est assez surprenant de voir à quel point les déversements peuvent se répandre rapidement et largement, qu'il s'agisse d'un petit déversement, d'un déversement de différents types de pétrole ou d'un déversement à différentes saisons», a indiqué le coordonnateur du projet, Dan Slavik.

L'ONE étudie les propositions de deux entreprises qui souhaitent réaliser des forages en haute mer dans l'Arctique: la Pétrolière impériale et Chevron Canada.

Les règles actuelles exigent qu'elles installent une seconde plateforme de forage près du puits principal pour pouvoir forer rapidement un puits de décompression en cas de déversement, ce qui faciliterait le colmatage de la fuite. Les deux entreprises tentent d'obtenir une exemption et proposent des méthodes qui, affirment-elles, seraient tout aussi efficaces et moins chères que d'installer une deuxième plateforme.

L'ONE a accepté d'évaluer leurs solutions de rechange.

La Pétrolière impériale devrait faire connaître ses projets cet automne, tandis que Chevron attendra jusqu'à l'an prochain. Les deux sociétés n'envisagent pas de commencer les forages avant 2020.