Les égouts débordent trop souvent dans le Richelieu, dénonce la Fondation Rivières, après avoir fait le sommaire des données publiques à ce sujet.

À Saint-Jean-sur-Richelieu, le poste de pompage principal a débordé de 103 à 149 fois chaque année entre 2008 et 2011.

Le réseau qui dessert entre autres Beloeil et Mont-Saint-Hilaire bat tous les records avec 1147 débordements pour la seule année 2011.

De façon générale, les réseaux d'égout sont autorisés à déborder en cas de pluie ou de fonte des neiges, mais pas par temps sec.

À Hemmingford, le même poste de pompage est en infraction depuis trois ans, pour débordement par temps sec.

«La situation d'Hemmingford est préoccupante, affirme la Fondation Rivières. On y dénombre entre 5 et 57 débordements d'eaux usées en temps sec, ce qui est totalement interdit par le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs (MDDEP). L'insuffisance de la capacité de pompage est établie comme cause du problème. Cela signifie que les eaux usées de toute nouvelle maison sont susceptibles d'aller directement à la rivière!»

Impact sur la qualité de l'eau

Les débordements d'égout trop fréquents sont déjà dénoncés par le Comité de concertation et de valorisation du bassin de la rivière Richelieu (COVABAR).

«C'est sûr qu'on aimerait qu'ils cessent, dit Marcel Comiré, coordonnateur de l'organisme. Ça a un impact sur la qualité de l'eau.»

Plusieurs villes, dont Hemmingford, sont toutefois en train de réaliser des travaux pour déverser moins d'eau usée non traitée dans les cours d'eau de la région.

«Certaines parties de notre système d'égouts ont plus de 60 ans, dit Drew Somerville, maire de la municipalité de 780 habitants. On travaille depuis au moins sept ans à séparer les égouts pluviaux des égouts sanitaires. L'an dernier, nous avons remplacé des pompes et cela a déjà un effet sur le nombre de déversements.»

Mais les problèmes à Hemmingford et ailleurs n'empêchent pas l'ajout de nouvelles maisons aux réseaux d'égout déjà surchargés.

En effet, un projet d'une douzaine de nouvelles résidences a été autorisé récemment à Hemmingford par le MDDEP, qui doit donner son accord à tout prolongement de réseau d'égout et d'eau.

En aval, dans la plus grande ville de la région, Saint-Jean-sur-Richelieu, «le poste de pompage Champlain qui pompe 60% de toutes les eaux usées de la Ville déborde très fréquemment, l'équivalent d'une fois tous les trois jours», souligne la Fondation Rivières.

Puis, plus en aval encore, Chambly dispose d'une usine de traitement récemment agrandie, mais on observe près de 200 débordements par année dans ce réseau.

Johanne Dion, porte-parole de la Fondation Rivières dans la région, habite à Richelieu, juste en face de Chambly.

«Nos égouts se font pomper à Chambly pour traitement, mais quand il pleut, ça déborde, dit-elle. On aimerait que les gens qui font des sports nautiques n'aient pas à s'inquiéter chaque fois qu'il pleut.»

Une «passoire»

Mme Dion dénonce le manque de volonté politique dans ce dossier et observe que «toutes les municipalités cherchent des fonds» pour corriger les problèmes.

«Ma ville refait chaque rue pour séparer l'égout pluvial de l'égout sanitaire, mais on se demande si c'est suffisant, dit-elle. Je me baignais dans le Richelieu il y a 50 ans, quand j'étais jeune, mais j'ai arrêté dans les années 70.»

Selon le portrait qu'en fait la Fondation Rivières, le vaste réseau qui dessert Beloeil, Mont-Saint-Hilaire, McMasterville et Otterburn Park ressemble à une passoire.

Il compte 57 points de déversement différents, dont 23 affichent plus de 20 déversements par année. Toutefois, les déficiences de ce réseau ne semblent pas être un frein à l'ajout de nouvelles résidences dans le secteur, note la Fondation.

Autre problème, mais résultat semblable à Saint-Bruno-de-Montarville, Saint-Basile-le-Grand et Saint-Julie. Les réseaux sont efficaces pour acheminer l'eau usée jusqu'à la station, mais celle-ci ne suffit pas toujours à la tâche.

Les riverains du Richelieu peuvent toutefois se compter chanceux: la rivière conserve un fort débit malgré la sécheresse, grâce à l'ampleur de son réservoir, le lac Champlain. «Il a un grand pouvoir de dilution et il coule en ligne droite, par comparaison avec la Yamaska avec ses méandres», dit Marcel Comiré.