L'ampleur des fuites dans les puits gaziers est plus importante que ce que reconnaît l'industrie, selon une nouvelle étude réalisée par une agence gouvernementale américaine.

Assez pour qu'on remette en question l'avantage du gaz sur le charbon en ce qui a trait à la lutte contre les changements climatiques.

L'étude a porté sur un gisement d'hydrocarbures au Colorado où le gaz est extrait à l'aide de la fracturation hydraulique, la même technique qui est utilisée pour le gaz de schiste.

Elle a été menée par une équipe de la National Oceanic and Atmospheric Administration, agence fédérale américaine et l'Université du Colorado.

Après avoir analysé l'air ambiant dans la région de Denver-Julesburg, les chercheurs ont conclu que les champs gaziers perdent environ 4% de leur méthane à cause de fuites. Cela s'ajoute aux fuites dans le système de collecte et de distribution du gaz.

Le méthane est un gaz à effet de serre (GES) important. Son pouvoir réchauffant est 20 fois plus élevé sur un horizon de 100 ans que le gaz carbonique. C'est aussi un des quatre gaz précurseurs d'ozone et un composant du smog.

S'il est vrai que la combustion du méthane relâche deux fois moins de GES que celle du charbon, cet avantage doit tenir compte des fuites de gaz. Selon cette étude, ces fuites pourraient être deux fois plus importantes que ce que reconnaît l'industrie.

«Les sources de méthane du système [d'extraction] de gaz naturel au Colorado sont probablement au moins deux fois plus élevées que ce qu'on présume», concluent les chercheurs, dans un article qui doit être publié dans la revue Journal of Geophysical Research. Ce n'est pas la première fois qu'une telle affirmation est faite, mais c'est de loin la recherche la plus crédible jusqu'ici à ce sujet.

La prestigieuse revue Nature en a d'ailleurs parlé dans son numéro d'hier. Selon Nature, les fuites de méthane pourraient annuler les avantages présumés du gaz sur le charbon en ce qui concerne le climat.

L'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) juge «accablante» cette nouvelle étude. Selon le directeur climat-énergie à l'AQLPA, Patrick Bonin, elle «démontre clairement que si le Québec poursuit le développement de l'exploitation des gaz de schiste, il lui sera impossible d'atteindre son objectif de réduction d'émission de GES pour 2020 et de respecter les normes sur la qualité de l'air ambiant».