Au Canada, le gouvernement souhaite réduire de 20 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020 grâce aux procédés de capture et stockage du carbone, ou CSC. Un acronyme comme une promesse : nettoyer notre charbon sale, verdir nos sables bitumineux et sauver le climat. Rien de moins. Comment? Simplement en renvoyant nos émissions de dioxyde de carbone (CO2) là d'où il vient, six pieds sous terre. Sur le papier, tout le monde est enthousiaste. En pratique, personne n'en veut dans sa cour.

Au delà des défis actuels concernant le stockage sécuritaire de CO2 dans le sous-sol, la viabilité économique et surtout l'acceptabilité sociale de ces procédés pèsent lourd dans la balance. Au Canada, le premier ministre Stephen Harper a alloué 1 milliard de dollars au développement des énergies propres. La majorité du budget sera utilisée pour des projets liés aux procédés de CSC. Pourtant, un vent de protestation contre ces projets se lève et se renforce depuis quelque temps aux États-Unis et en Europe. Un vent nommé NUMBY pour Not Under My Back Yard.

Dans une Europe congestionnée, il est vraisemblable que les structures des CSC seront proches de régions très peuplées. Aussi la population locale s'oppose au stockage souterrain du carbone, car elle y voit une menace à la santé publique : contamination des eaux si des fuites apparaissent, largage en surface de concentration mortelle de gaz...

Au printemps dernier, une équipe de scientifiques a publié dans Nature les résultats d'une recherche montrant que du CO2 stocké naturellement dans 9 réservoirs de gaz (Europe, Asie, Amérique du Nord) était resté en place pour des millions d'années. Sans fuite. Cela n'a pourtant pas empêché l'arrêt d'une usine de CSC en Allemagne suite à la pression populaire. En Ohio, une autre installation a dû stopper ses activités. De la même façon en Hollande, Shell a dû reculer. Le Canada ne saurait être épargné par cette vague.

Communiquer localement, c'est le nerf de la guerre. En France, le premier essai d'enfouissement vient d'avoir lieu sur le site gazier de Lacq. Pour rassurer la population, une batterie de 35 capteurs renifle toute fuite de gaz éventuelle en surface. Une enquête publique avait d'ailleurs précédé le chantier. Une enquête qui a surtout montré le scepticisme de la population sur la pertinence de cette approche pour résoudre l'effet de serre.