Malgré les ballots qui s'accumulent autour des centres de tri, le papier que les Québécois mettent au bac vert ne finit pas à l'enfouissement, assure Recyc-Québec.

L'organisation dit suivre de près la crise du recyclage qui frappe la province depuis la fermeture des portes de la Chine, en janvier dernier. Même si la santé financière de plusieurs centres de tri québécois a été durement mise à mal, «il n'y a pas d'indication que des ballots ont été envoyés à l'élimination. C'est ce qu'on veut éviter le plus possible», dit Sophie Langlois-Blouin, vice-présidente à la performance des opérations de Recyc-Québec.

Plusieurs centres de tri menaçant de fermer - un s'est même officiellement placé sous la protection des tribunaux -, Recyc-Québec a discuté vendredi avec l'Union des municipalités du Québec et les municipalités de la Rive-Sud, les plus touchées. Sophie Langlois-Blouin assure que l'enfouissement n'est pas envisagé, bien que le papier s'accumule. 

«Ce n'est pas une option que les municipalités envisagent. Elles veulent s'assurer de maintenir le service aux citoyens, que les citoyens continuent de mettre leurs matières dans leur bac.»

Contrairement à d'autres provinces, les villes québécoises n'auraient pas à demander la permission pour envoyer des matières à l'enfouissement. Recyc-Québec estime toutefois que les municipalités n'ont pas intérêt à le faire puisqu'elles seraient triplement pénalisées.

D'abord, les villes devraient verser une redevance pour l'enfouissement de ces matières. Ensuite, elles verraient leur compensation couvrant leurs frais de recyclage amputée; les entreprises couvrent la majeure partie de la facture depuis 2005. Enfin, détourner les matières recyclables vers le dépotoir risquerait de créer une crise de confiance envers tout le système de collecte.

«Maintenir le service de collecte contribue à maintenir la confiance. Mais s'assurer que les matières sont bien récupérées et triées, c'est essentiel pour assurer la confiance», poursuit Sophie Langlois-Blouin.

En quête de solutions

Pour continuer à vendre leurs matières recyclables, plusieurs centres de tri ont revu leurs pratiques. Certains ont ralenti la vitesse du convoyeur sur lequel les matières recyclables sont triées, afin d'améliorer la qualité des ballots. Sophie Langlois-Blouin indique que plus du tiers des 23 centres de tri desservant les municipalités ont réussi à réduire leur taux de contamination à 1 à 3%, ce qui reste toutefois supérieur au taux de 0,5% demandé par la Chine.

Le gouvernement a récemment annoncé une aide de 3,45 millions de dollars pour permettre à quatre centres de tri de moderniser leurs installations et soutenir trois entreprises fabriquant des produits à partir de plastique recyclé au Québec.

Les citoyens aussi peuvent contribuer. Reconnaissant qu'il peut être difficile de s'y retrouver, Recyc-Québec a lancé en avril une application pour téléphones intelligents, Ça va où?, qui permet de déterminer comment disposer de 800 produits. Poubelles, bac vert ou bleu, écocentre ? Les municipalités ne récupérant pas tout de la même façon, les conseils varient selon l'emplacement de l'utilisateur.

Recyc-Québec souligne que la crise frappe le papier mixte, le plastique mixte et les sacs de plastique. Les autres matières, dont le carton, l'aluminium et certains types de plastique, continuent à bien se vendre.

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LE RECYCLAGE COÛTERA CHER EN 2018

Recyc-Québec s'attend à une année 2018 coûteuse pour le service de collecte. Alors que les revenus de la vente de matières recyclables sont en forte baisse, la pénurie de main-d'oeuvre touchant la province fait grimper les coûts d'exploitation. La collecte sélective a coûté 165 millions en 2016 aux municipalités - les données de 2017 seront connues à la fin de juin. On s'attend à ce que la facture grimpe cette année, trouver du personnel étant difficile dans plusieurs régions en raison de la bonne performance économique du Québec. Pour les revenus, la vente des matières recyclables a généré des revenus de 13,2 millions pour les municipalités en 2016. Avec la crise qui sévit depuis janvier, Recyc-Québec s'attend à ce que les revenus baissent considérablement en 2018, voire soient inexistants. À noter : pour couvrir les frais de la collecte, les municipalités ont aussi reçu 139 millions en 2016 en compensation des entreprises. Le montant de 2017 devrait être connu à l'automne.