«On vit une crise.» La mairesse de Montréal joint sa voix à celle de Longueuil pour réclamer l'aide de Québec afin de faire face aux difficultés dans l'industrie du recyclage et ainsi éviter que les matières recyclables finissent à l'enfouissement.

«On interpelle le gouvernement du Québec pour qu'il s'implique davantage et donne un appui aux municipalités», a plaidé Valérie Plante. Elle réagissait ainsi à un reportage de La Presse sur les difficultés vécues par de nombreuses municipalités de la Rive-Sud et de l'Estrie, dont la collecte est perturbée. Des centres de tri et exploitants demandent à renégocier leur contrat à la hausse en raison de la fermeture de la Chine, qui n'accepte plus le papier recyclé contaminé.

«La dernière chose qu'on veut, c'est de juste enfouir les matières recyclables. Certaines villes s'en vont dans cette direction et on ne veut pas cela», a déclaré la mairesse.

La mairesse n'a pas caché son irritation de voir l'état dans lequel se trouve son centre de tri, où les ballots s'empilent autour du bâtiment, exposés aux éléments. «Non, on n'est pas contents. Ça montre comment, quand on n'a pas de vision à long terme, on doit gérer au cas par cas, à chaque crise», se désole Valérie Plante.

En fait, ces tonnes de papier risquent de ne plus pouvoir être recyclées si elles restent ainsi exposées aux éléments. «C'est une matière putrescible : ça pourrit. Ça se dégrade aux intempéries, à la chaleur, à la lumière. Les laisser dehors, c'est les laisser dans les pires des conditions», dit Karel Ménard, directeur général du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets.

Pour ce dernier, le Québec fait présentement du «déni» face à la crise du recyclage. «On ne veut pas réaliser qu'on ne fait peut-être pas les choses de la bonne façon. Notre système de collecte a atteint ses limites, on peut même dire qu'on les a frappées», dit Karel Ménard.

Collecte pêle-mêle

Le problème? La collecte pêle-mêle. Le papier, le plastique, le verre et le métal se retrouvent mélangés dans le même bac, se contaminant entre eux et devenant difficiles à séparer. «On ne s'est jamais attardé à la qualité, mais on a toujours visé la quantité», poursuit M. Ménard.

Le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets en appelle à une révision en profondeur de la collecte des matières recyclables. Il propose notamment d'envisager le tri à la source, soit de demander aux citoyens de disposer de leurs matières dans des bacs différents pour éviter la contamination.

L'organisation appelle aussi à mieux informer les citoyens sur ce qui se recycle ou pas. «Les gens deviennent tout mélangés. Ça devient compliqué savoir ce qu'on peut mettre dans le bac. Les citoyens de Longueuil peuvent mettre des choses qui ne sont pas acceptées à Montréal. On a autant de façons de faire le recyclage qu'on a de centres de tri», déplore Karel Ménard.

Les mauvaises nouvelles s'accumulant, l'environnementaliste note que la crise du recyclage risque de se transformer en crise de confiance envers le recyclage. «La crise va coûter des millions à régler. Mais le pire, c'est que ça va nous coûter la confiance. Et ça, ça n'a pas de prix.»