Après avoir été à couteaux tirés lors de la conférence sur les changements climatiques de Copenhague, les premiers ministres Stephen Harper et Jean Charest ont partagé la même tribune aujourd'hui pour une annonce... environnementale.

L'annonce portait sur la gestion des matières résiduelles et non les émissions de gaz à effet de serre, un dossier plus épineux qui laisse poindre une crise d'unité canadienne.

 

En novembre, Québec a annoncé son intention de bannir l'enfouissement des matières organiques d'ici 10 ans, ce qui nécessitera des investissements de 650 millions$ pour la construction d'usines de biométhanisation et de compostage. Un peu plus de la moitié de cette somme proviendra du gouvernement québécois. Ottawa dévoilera aujourd'hui sa contribution, puisée dans le Fonds pour l'infrastructure verte. Ce programme est doté d'une enveloppe d'un milliard de dollars pour l'ensemble du Canada.

La construction, à Rivière-du-Loup, d'une usine de transformation de déchets de table en biocarburant est confirmée, une première au Québec.

Une annonce commune de Stephen Harper et Jean Charest sur le thème de l'environnement a de quoi surprendre, surtout trois semaines après la conférence des Nations unies sur les changements climatiques.

Jean Charest a alors lancé des attaques virulentes contre Ottawa et sa position sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il a condamné l'idée de fixer des objectifs moins contraignants au secteur pétrolier et gazier. Le premier ministre a même affirmé qu'il y a actuellement «deux Canada»: l'un représenté par Ottawa et ses timides ambitions environnementales, et l'autre représenté par des provinces qui ont des objectifs ambitieux.

Stephen Harper s'est montré agacé par ces critiques. Le premier ministre de l'Alberta, Ed Stelmach, a quant à lui fait valoir que les revenus générés par l'exploitation des sables bitumineux dans sa province profitent aussi au Québec grâce au programme de péréquation. Les analystes politiques voient dans ce conflit les premiers signes d'une crise d'unité canadienne.

L'annonce d'aujourd'hui aura lieu à Rivière-du-Loup, là où la dernière visite de Stephen Harper avait provoqué une commotion au sein du gouvernement Charest.

En décembre 2007, M. Harper s'était rapproché de Mario Dumont, alors chef de l'opposition officielle, allant jusqu'à débarquer dans sa circonscription pour participer en sa compagnie à un dîner de la chambre de commerce locale. Le ministre responsable de la région, Claude Béchard, était furieux de ne pas avoir été invité à l'événement. Jean Charest a ensuite pris ses distances des conservateurs.

Les relations entre MM. Charest et Harper ne se sont pas améliorées depuis, mais le paysage politique a changé à Rivière-du-Loup en faveur des deux hommes. Lors d'élections partielles l'an dernier, Jean D'Amour (PLQ) et Bernard Généreux (PCC) se sont emparés de ce bastion, adéquiste au provincial et bloquiste au fédéral. Les deux députés assisteront à l'annonce, de même que la ministre de l'Environnement, Line Beauchamp, et Claude Béchard.

Le maire de Rivière-du-Loup, Michel Morin, participera à l'événement. Son projet de biométhanisation des matières organiques ira de l'avant. Implantée à Cacouna, l'usine transformera les déchets de table en carburant qui pourrait être utilisé par des camions de la municipalité. Rivière-du-Loup, la MRC et la firme privée Envirogaz de Portneuf ont créé une société mixte en 2008 afin de mener à bien le projet. La Ville réclame depuis des mois 4 millions du fédéral, le tiers des coûts du projet. L'automne dernier, en campagne électorale, Bernard Généreux avait promis de faire progresser le dossier rapidement.

La grande région de Montréal compte six projets d'usine de compostage et de biométhanisation, dont deux dans la métropole.