Le Québec a annoncé aujourd'hui sa cible de réduction des gaz à effet de serre à l'horizon 2020: moins 20%, sous leur niveau de 1990. Moins élevé que les recommandations scientifiques, l'objectif dépasse néanmoins tous les engagements pris à ce jour en Amérique du Nord.

Le premier ministre Jean Charest a en effet choisi de calquer la démarche de la province sur celle de l'Union européenne en optant pour une même réduction, mais aussi en promettant de la bonifier si d'autres pays font de même.

«Cette cible permettra au Québec de conserver le meilleur bilan des émissions de gaz à effet de serre en Amérique du Nord, a précisé M. Charest lors d'un diner organisé par le Conseil des relations internationales de Montréal. En comparaison avec l'Europe, nos émissions seront de huit tonnes par habitant, contre 9 tonnes pour l'Europe.»

À la suite d'une courte consultation publique sur le sujet, le gouvernement Charest a donc opté pour la plus haute cible proposée dans le document de réflexion qu'il avait lui-même élaboré, lequel suggérait un objectif situé entre 10% et 20%.

Mais contrairement à ce que laissaient entendre certains reportages ce week-end, il s'est toutefois gardé de répondre favorablement à Équiterre et au Conseil patronal de l'environnement du Québec, qui exigeaient plutôt une cible d'au moins 25%.

D'ailleurs, Équiterre, la Fondation David Suzuki et l'organisme Vivre en ville ont eu beau saluer la volonté du Québec d'agir, ils ont aussi affirmé en choeur qu'il peut faire beaucoup mieux, une critique également formulée par le Parti québécois, Nature Québec, Greenpeace, l'Association de lutte contre la pollution atmosphérique et le Réseau québécois des groupes écologistes.

 

Très audacieuse?

Cela dit, dans le contexte de la tenue prochaine de la Conférence de Copenhague sur le climat, la cible de 20% est-elle néanmoins «très audacieuse», comme l'a soutenu le premier ministre? Tout dépend à qui vous comparez le Québec.

En optant pour une telle cible, la province emboîte en effet le pas aux pays membres de l'Union européenne, mais elle demeure en-dessous de la cible recommandée par le GIEC, le Groupe d'experts du climat de l'ONU. Dans son plus récent rapport, celui-ci estime nécessaire que les pays industrialisés réduisent leurs émissions de 25% à 40%, afin de limiter le réchauffement global à environ 2 degrés C.

C'est d'ailleurs ce qui explique que la province est loin derrière les pays européens les plus audacieux qui ont choisi de faire plus que l'Europe afin de répondre favorablement au GIEC, comme la Suède (40%), la Norvège (30%) et le Royaume-Uni (34%).

En revanche, le Québec se positionne bien dans le contexte nord-américain. Au Sud de la frontière, la Californie s'est engagée à ramener ses émissions à leur niveau de 1990, tandis que l'Oregon prévoit une diminution de 10% (les États-Unis n'ont pas encore d'objectif officiel).

Au pays, l'Ontario cible 15%, la Colombie-Britannique 11%. Le Canada, quant à lui, se contentera de réduire ses émissions d'un «mince 3%» sous leur niveau de 1990, pour reprendre les mots de M. Charest. Ce dernier a d'ailleurs exhorté Ottawa, une fois de plus, à réviser ses ambitions à la hausse, afin de faire meilleure figure sur le plan international.

Le premier ministre québécois demande aussi à Stephen Harper de cesser de reconnaître les efforts des provinces, mais aussi de cesser de calculer ses émissions sur la base de leur niveau de 2006 et de favoriser plutôt l'année de référence de la communauté internationale, soit 1990. Cela, afin de garantir au Québec et à ses industries que les efforts entrepris avant 2006 seront bel et bien reconnus.

 

Plan d'action

Le premier ministre québécois demande aussi à Stephen Harper de cesser de calculer ses émissions sur la base de leur niveau de 2006 et de favoriser plutôt l'année de référence de la communauté internationale, soit 1990. Cela, afin de garantir au Québec et à ses industries que les efforts entrepris avant 2006 seront bel et bien reconnus.

En plus de s'assurer que le Québec participera au Marché du carbone dès 2012, le premier ministre a en effet promis de développer «davantage» le transport collectif et de réviser la loi sur l'aménagement et l'urbanisme, entre autres.

Il reconnaît que certaines décisions récentes (Turcot, prolongement de la 25, Notre-Dame, etc.) peuvent apparaître contradictoires, dans ce contexte, mais il répond ceci : «Dans le domaine de l'environnement, il faut se rappeler quelque chose, il n'y a pas d'utopie. Tout ce que l'homme fait sur la terre a une conséquence sur l'environnement. Il faut choisir les gestes qui ont le moins d'impact.»

 

francois.cardinal@lapresse.ca