Plus de 40 ans après le fameux «Maître chez nous» de Jean Lesage, un regroupement écologiste s'inspire de la nationalisation de l'électricité pour relancer l'idée d'un vaste chantier sur la gestion de l'énergie au Québec. Le projet est ambitieux: faire du Québec une province indépendante des sources d'énergie non renouvelables

«Il faut cesser d'être opprimés par notre dépendance énergétique. Qu'il s'agisse de chauffage de maison, d'industrie, de transport automobile et collectif ou de toute autre forme d'activité, nous pouvons mettre en place des moyens de fournir de l'énergie propre à tout le Québec», soutient l'écologiste Daniel Breton, l'un des instigateurs du mouvement MCN21 (l'acronyme pour Maîtres chez nous XXIe siècle).

Né de l'initiative d'une poignée de groupes écologistes, le MCN21 a déjà reçu l'appui de plusieurs politiciens - dont le député du NPD Thomas Mulcair, le député de Québec solidaire, Amir Khadir, le député péquiste Scott McKay -, de scientifiques et de la Centrale des syndicats du Québec, présents vendredi lors du lancement du projet à Montréal. Le MCN21 se présente toutefois comme une formation «apolitique» et citoyenne.

En cette période de crise, le potentiel économique du projet est mis à l'avant-scène. Les gouvernements prévoient investir des sommes colossales pour la mise au point des infrastructures: «Il faut que la majeure partie de ces investissements soient consacrés à un New Deal vert», dit Daniel Breton. Car les écologistes dressent un bilan très sombre du développement énergétique de la province depuis les dernières années. Ils estiment que le projet de réfection de la centrale nucléaire de Gentilly-2 et du port méthanier de Rabaska fera reculer la province «avant 1962». Même l'exploitation de l'hydroélectricité est remise en question et ne reçoit pas le statut enviable d'énergie verte. «Bleue? Oui. Verte? Non, et il ne faut certainement pas la développer à tout prix. Un projet comme celui de la Romaine n'est pas le plus enviable écologiquement», insiste Daniel Breton. Anne-Marie Saint-Cerny, présidente de la Fondation Rivières, est encore plus critique. «Il n'y a plus une seule chute au Québec qui n'est pas menacée (par la construction d'un barrage).»

Le MCN21 rêve que le Québec devienne un «leader mondial» en misant dorénavant sur la création de programmes d'efficacité énergétique et l'exploitation des filiales de la géothermie, de l'énergie solaire et de l'éolien. Le professeur de l'Université Laval Michel Duguay a fait valoir vendredi que si Québec consacrait 1% de son territoire à la production d'énergie éolienne, il pourrait multiplier par deux sa production totale d'énergie. «Et on en aura bien besoin pour assurer la transition vers la voiture électrique!»

Le MCN21 n'a pas encore de plan d'action concret pour permettre au Québec d'atteindre l'indépendance énergétique. Une tournée de consultations débutera le 28 avril prochain pour recueillir les suggestions des Québécois d'un bout à l'autre de la province, afin de dégager un plan d'action qui serait ensuite soumis, dans un an, au premier ministre.