Le président des États-Unis, Barack Obama, juge que le Canada doit travailler à réduire les émissions de gaz à effet de serre provoquées par l'extraction du pétrole des sables bitumineux.

Dans une entrevue au réseau CBC, le président Obama a estimé que cette méthode de production du pétrole laissait une trop grande empreinte écologique et qu'il fallait miser sur les technologies vertes pour développer des procédés de séquestration du carbone, afin de capter les émissions de GES avant qu'elles ne se rendent dans l'atmosphère.

 

«Le dilemme du Canada, des États-Unis, de la Chine et du monde entier est de trouver comment obtenir l'énergie dont nous avons besoin pour faire croître nos économies sans faire accélérer rapidement les changements climatiques», a dit le président Obama, à CBC.

Il estime que la lutte contre les changements climatiques ne peut se faire de façon isolée et que le Canada et les États-Unis devront collaborer, de même que le Mexique, mais aussi la Chine et l'Inde, dont les besoins en énergie sont immenses.

«Nous devrons tous travailler ensemble de façon efficace pour trouver l'équilibre entre les impératifs de la croissance économique et les préoccupations réelles quant aux effets que nous avons sur notre planète», a souligné Barack Obama.

«Ultimement, je pense que ça peut être résolu par la technologie», a-t-il ajouté, précisant que le problème se pose aux États-Unis avec le charbon, source d'énergie peu coûteuse, mais très polluante.

Mise en garde

Les propos du président américain ont fait écho, hier, à la mise en garde d'environnementalistes canadiens et américains qui estiment que le Canada risque de se retrouver isolé s'il ne modifie par sa position, notamment sur les sables bitumineux, que le gouvernement Harper défend bec et ongles.

«Je ne pense pas que l'administration ou le Congrès américain accepteront de cautionner une politique canadienne qui n'irait pas dans la direction qu'on veut faire prendre aux États-Unis, a souligné Alden Meyer, de l'organisation écologiste américaine Union of Concerned Scientists.

«Il n'y a pas de doute qu'il y a des avantages à acheter l'énergie au Canada, étant donné l'étroite relation que nous avons, mais je ne pense pas que le président Obama veut faire ça aux dépens de l'environnement», a-t-il ajouté.

Les environnementalistes craignent que Stephen Harper tente de soustraire les sables bitumineux de la liste des carburants dits «polluants» et rejetés par les Américains.

«Le gouvernement canadien va faire tout en son pouvoir pour favoriser le pétrole issu des sables bitumineux dans toute réglementation aux États-Unis», a critiqué Steven Guilbeault, d'Équiterre, qui estime que le Canada n'aura pas le choix de se conformer à des standards plus sévères.

«L'ensemble de la planète va de l'avant. On va se faire imposer ces normes-là par nos partenaires économiques et politiques. On peut jouer à l'autruche, mais ça s'en vient et très rapidement, a-t-il souligné. Est-ce qu'on peut se permettre d'arrêter de vendre le pétrole issu des sables bitumineux aux États-Unis? Non. Si la question, c'est: «On arrête de vendre ou on nettoie, on va nettoyer. On va mettre en place des règlements, on va faire payer les compagnies.»

Nouvelles pratiques

Le gouvernement ne doit pas condamner l'industrie des sables bitumineux, mais bien lui faire adopter des pratiques plus vertes, croit pour sa part Matthew Bramley, de l'Institut Pembina. «Plusieurs analystes soutiennent que l'industrie des sables bitumineux pourrait radicalement réduire ses émissions de gaz à effet de serre tout en continuant de produire, a-t-il expliqué. Les profits seraient peut-être un peu inférieurs, mais ce sera toujours une industrie profitable, même si on exige la capture des émissions produites par les sables bitumineux.»

Les environnementalistes espèrent que le président américain, en visite à Ottawa demain, fera entendre raison au premier ministre Harper sur les efforts à déployer dans la lutte aux changements climatiques. Selon eux, il ne sera pas possible pour le Canada de travailler en collaboration avec les États-Unis tant que les efforts ne seront pas comparables quant aux investissements et à la réglementation.