Les environnementalistes, géants pétroliers et le gouvernement de Justin Trudeau auront les yeux tournés vers Calgary, ce matin, à 10 h, alors que l'Office national de l'énergie (ONE) y déposera son réexamen de l'agrandissement de l'oléoduc Trans Mountain. Cette fois, l'ONE se prononcera en mettant au premier plan la Loi sur les espèces en péril à l'égard du transport maritime qu'entraînerait le prolongement de l'oléoduc, a confirmé l'Office à La Presse.

Concrètement, l'Office dira s'il estime être toujours d'accord avec l'agrandissement de l'oléoduc à la lumière de l'inventaire et des nouvelles données océaniques. Celles-ci démontrent, entre autres, que les stocks de saumon royal (quinnat), l'une des sources principales de l'alimentation des épaulards, sont en baisse constante. Or, l'épaulard est inscrit sur la liste des espèces en voie de disparition depuis 2003 en vertu des lois canadiennes. 

L'ONE tiendra aussi compte de deux autres menaces pour les baleines : l'exposition aiguë à des perturbations physiques et acoustiques (le trafic maritime), et les contaminants chimiques, liés par exemple aux activités humaines (les antibiotiques).

Des millions perdus chaque jour

Au mois de mai 2016, l'Office national de l'énergie avait publié un rapport dans lequel il recommandait au gouverneur en conseil d'approuver le projet d'agrandissement du réseau de Trans Mountain, sous réserve de 157 conditions. Puis, en août 2018, volte-face : la Cour d'appel fédérale reprochait à l'Office de ne pas avoir pris en compte de « manière appropriée » les impacts de la présence de navires pétroliers additionnels dans les eaux sur les épaulards. La Cour rendait ainsi une décision annulant le décret approuvant l'agrandissement de l'oléoduc et invalidant le certificat délivré par l'ONE.

À Ottawa, le dossier de l'agrandissement de Trans Mountain est devenu épineux, surtout à l'approche des élections fédérales, prévues à l'automne. Depuis l'achat de l'oléoduc au coût de 4,5 milliards, en août dernier, la pression est de plus en plus forte au gouvernement libéral pour trancher. La province de l'Alberta fait valoir que, pour chaque jour de report, le pays perd des millions de dollars dans son économie. Elle estime les revenus de l'agrandissement du pipeline à 46,7 milliards dans les 20 prochaines années.

L'avis autochtone

En plus de l'avis de l'ONE, le ministre des Ressources naturelles et député d'Edmonton, Amarjeet Sohi, a ordonné une nouvelle série de consultations des communautés autochtones. Depuis le mois d'octobre, 70 communautés ont été rencontrées par les équipes fédérales, assure-t-on au Ministère, mais il reste plus de 60 communautés à approcher.

Rétablissement impossible

Depuis l'annonce de l'agrandissement du réseau Trans Mountain, les écologistes martèlent que le projet rendra quasiment impossible le rétablissement des épaulards. Le plan de protection des océans, dévoilé en 2016 - après l'avis favorable de l'ONE -, comprend des zones protégées pour les baleines, des mesures pour rétablir les stocks de saumons et des règles plus strictes pour réduire le bruit des bateaux autour des baleines.

- Avec La Presse canadienne