Le sort de 39 espèces sauvages canadiennes fera l'objet de délibérations cette semaine, à Ottawa, dans le cadre de la deuxième réunion annuelle du comité chargé de conseiller le gouvernement fédéral sur sa liste des espèces en péril.

Ce comité indépendant évalue la situation d'espèces qui semblent en danger de disparition, en passant des lichens aux mammifères marins, pour déterminer le statut qui devrait leur être attribué.

Parmi les cas à l'étude cette semaine figure celui de l'ours polaire, cet emblème des dérèglements climatiques dont la situation est seulement désignée comme « préoccupante », soit le plus bas niveau d'alarme.

L'expert en biodiversité Arne Mooers, qui siège depuis près de trois ans au Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), s'attend à vivre une semaine éprouvante.

« C'est difficile pour le moral, admet-il. On a l'idée que ce qu'on fait est important pour vraiment savoir ce qu'il se passe avec les espèces. On fait ce qu'on peut. »

Sa frustration vient du fait qu'une fois leurs discussions terminées et leurs recommandations formulées, la balle est dans le camp du gouvernement.

« C'est dans la (Loi sur les espèces en péril) qu'ils doivent nous écouter, mais ce qu'ils font après, c'est une autre question », explique M. Mooers.

« C'est toujours une question d'argent », poursuit-il, alors que toute inscription à la liste officielle des espèces en péril implique des protections légales, telles que des interdictions de chasse, qui peuvent s'avérer coûteuses.

M. Mooers souligne que le processus d'inscription à cette liste puis l'élaboration et la mise en oeuvre de programmes de rétablissement peuvent prendre jusqu'à dix ans, soit un délai deux fois plus long qu'initialement prévu.

« En tant que scientifique, je crois qu'ils doivent prendre les décisions plus vite. Ça, c'est sûr. »

M. Mooers, qui enseigne à l'Université Simon Fraser, en Colombie-Britannique, concède toutefois que la valeur de la sauvegarde d'une espèce est difficile à quantifier : « C'est compliqué décider si on veut payer ce qu'il faut payer pour ménager une espèce sauvage qui est en péril ».

« J'ai été élevé sur une petite ferme. La nature est une des choses les plus importantes dans ma vie, mais comme scientifique, je ne sais pas exactement pourquoi il faut sauver telle ou telle espèce », reconnaît-il.

« Si on demande aux Canadiens : "Est-ce que vous aimez la nature ? Est-ce que vous croyez que c'est important ? Est-ce qu'on doit investir dans l'environnement ?" La plupart des Canadiens disent oui, fait-il valoir. Les gens qui habitent loin d'une espèce d'oiseau quelconque n'ont pas vraiment d'idée de sa valeur, mais ça fait partie de quelque chose de plus grand. »