Il y a 10 ans, cela n'arrivait pas. Aujourd'hui, c'est quasi la norme. Les morses du Pacifique doivent se réfugier par dizaines de milliers sur les plages d'îlots perdus dans l'océan Arctique, faute de glaces pour se reposer.

Les images ont fait le tour du monde et pourraient devenir un symbole de plus du réchauffement climatique.

«Encore une fois, le retrait extrême de la banquise au large de l'Alaska a poussé un grand nombre de morses à se hisser sur les plages au lieu de se reposer sur les glaces flottantes», affirme l'Agence géologique américaine (USGS), sur son site web.

«Ce spectacle est devenu commun dans six des huit dernières années, conséquence du réchauffement climatique. L'été, la banquise recule très loin des eaux peu profondes de la mer de Chukchi, au large de l'Alaska et de la Russie, ce qui n'était pas le cas il y a 10 ans.»

Impact à long terme?

Il est trop tôt pour dire si ce nouveau contexte sera une menace à long terme pour les pinnipèdes géants.

Selon Lena Measures, chercheuse à l'Institut Maurice-Lamontagne, de Pêches et Océans Canada à Rimouski, le morse peut jeûner pendant des semaines en attendant le retour de l'hiver.

Elle trouve que les images des échoueries de la mer de Chukchi sont «impressionnantes». «Cela a été observé dans le passé, mais on dit qu'il y en a plus que jamais», dit-elle.

«C'est dur à dire quel est l'impact à long terme, ajoute-t-elle. Est-ce qu'il y a un lien avec les changements climatiques? Il y a de la variation d'une année à l'autre.»

En attendant, la situation des morses sur la plage peut être précaire, dit-elle.

«Le problème avec une énorme population de morses sur une même plage, c'est qu'ils s'entassent les uns sur les autres, dit-elle. C'est une espèce très sociable. Mais s'il y a un avion qui passe très bas, ou même un ours polaire qui arrive, ça peut créer la panique. Les morses vont vers l'eau et les bébés, plus petits et plus faibles, peuvent mourir écrasés.»

Les autorités américaines ont d'ailleurs ordonné aux avions d'éviter l'endroit.

Mme Measures estime que les morses sont à risque d'épuisement s'ils cherchent à continuer de s'alimenter depuis leur plage.

En temps normal, les morses dérivent sur la banquise et plongent là où cette plateforme de pêche naturelle les porte, à la recherche de crustacés et de mollusques.

«S'il leur faut nager loin pour se nourrir, ça va avoir un effet sur leurs réserves énergétiques», dit-elle.

Il faut remonter à 2001 pour trouver une année où la fonte annuelle de la banquise a été en deçà de la moyenne des années 1981-2010. Le record absolu de fonte a été atteint en 2012, mais les 10 dernières années sont fortement en dessous de la moyenne.

Étendue minimale de la banquise arctique

(en millions de km2)

• 2014: 5

• 2013: 5

• 2012: 3,4

• 2011: 4,3

• 2010: 4,6

• 2009: 5,1

• 2008: 4,6

• 2007: 4,2

• 2006: 5,8

• 2005: 5,3

• Moyenne (1981-2010): 6,3

Source: National Snow and Ice Data Center (NSIDC)