Des petits radiateurs pourraient sauver la vie des chauves-souris. Pour lutter contre le mystérieux syndrome du nez blanc qui a exercé des ravages en Amérique du Nord ces trois derniers hivers, des chercheurs proposent de chauffer les grottes pendant l'hibernation.

L'objectif des biologistes qui ont exposé leur idée dans la revue en ligne Frontiers in Ecology and the Environment est de fournir une chaleur artificielle pour aider les petits mammifères volants à conserver leur précieuse énergie et ainsi survivre à l'hiver.

Le syndrome du nez blanc a tué, directement ou indirectement, près de 500 000 chauves-souris depuis trois ans, de la Nouvelle-Angleterre (nord-est des États-Unis) jusqu'à la Virginie-Occidentale (est). Le phénomène d'abord observé dans quelques grottes du centre de l'État de New York il y a deux hivers s'est depuis propagé à au moins 55 grottes dans sept États.

La maladie se repère aux taches blanches poudreuses dues à la présence d'un champignon, qui apparaissent sur le nez et les ailes des animaux pendant l'hibernation. Les bêtes touchées perdent les réserves de graisse qui permettent normalement à leur corps de passer l'hiver, et elles semblent mourir de faim avant d'atteindre le printemps.

L'hécatombe est d'autant plus inquiétante que les chauves-souris jouent un rôle important pour la préservation de l'équilibre des écosystèmes, notamment par le contrôle des populations d'insectes qui peuvent s'attaquer aux cultures ou par la pollinisation des plantes.

En partant de la théorie selon laquelle les chauves-souris souffrant du syndrome du nez blanc sortent plus souvent que les autres d'hibernation et donc brûlent davantage de leur graisse pour maintenir leur température corporelle, les chercheurs Justin Boyles et Craig Willis ont réalisé un programme informatique de simulation de l'énergie dépensée par ces mammifères encore souvent mal-aimés. Ils en tirent la conclusion que de petites boîtes équipées de radiateurs à piles offriront un refuge tout chaud.

Sachant que les chauves-souris hibernant préfèrent les endroits plus chauds des grottes dans leurs moments d'activité, les scientifiques veulent voir si elles choisiront leurs boîtes chauffées. Le test sera mené pendant les prochains dans une grotte canadienne du Manitoba. L'étude est financée par une bourse de 28.000 dollars (22.100 euros) du Service fédéral amércain de la pêche et de la faune (FWS).

Au-delà des questions logistiques et financières, Craig Willis convient que l'intervention présente le risque, en permettant à des animaux malades de passer l'hiver, de les voir ensuite contaminer leurs semblables cet été. David Blehert, qui a identifié le champignon responsable du syndrome du nez blanc dans les laboratoires de l'Institut géologique des États-Unis, souligne toutefois que le champignon a besoin du froid pour s'épanouir.

Comme d'autres chercheurs, il est donc favorable à l'expérience des radiateurs. «Ce n'est pas la solution magique», explique-t-il, «mais cela pourrait donner à un certain nombre de chauves-souris une chance de survivre à l'hibernation».