Dans l'espoir d'apaiser l'indignation des Européens, le premier ministre Jean Charest est prêt à considérer une révision de la méthode controversée de la chasse aux phoques.

M. Charest a abordé l'épineuse question avec le commissaire à l'Environnement à la Commission européenne, Stavros Dimas, lors d'une rencontre à huis clos à Bruxelles.

En point de presse dans la capitale belge, dimanche, le premier ministre a dit vouloir tout mettre en oeuvre pour aplanir les irritants qui ont mené l'Union européenne à bannir les produits du phoque, plus tôt ce printemps.

Le principal irritant est la mise à mort des bêtes à coups de gourdin, une méthode traditionnelle dénoncée par les animalistes, des personnalités comme Brigitte Bardot et Paul McCartney et une brochette de politiciens indignés par les images de blanchons ensanglantés agonisant sur la banquise.

«Tout cela est une question de perception mais c'est une perception qui est fausse. Ce n'est pas vrai que nous chassons les blanchons mais l'image a perduré», a fait remarquer le premier ministre, en marge d'une célébration de la Fête nationale du Québec organisée dans un parc de Bruxelles par la délégation québécoise.

M. Charest estime que la méthode de chasse au gourdin est tout à fait conforme aux normes internationales mais est disposé à envisager une façon alternative d'abattre les bêtes si cela permet de convaincre les Européens de revoir l'embargo.

«Nous sommes prêts à avoir cette discussion s'il le faut. C'est peut-être une piste de solution. S'il faut revoir la méthode, on la reverra», a dit le premier ministre.

Par une écrasante majorité, les parlementaires de l'Union européenne ont adopté en mai dernier un projet de réglementation en faveur d'un embargo bannissant toute commercialisation ou importation des produits du phoque dans les 27 pays membres à compter de 2010.

Seuls les produits du phoque issus de la chasse inuite et autochtone font l'objet d'une dérogation.

À l'Assemblée nationale, les députés ont condamné la décision européenne par l'entremise d'une motion.

L'embargo risque d'amputer du tiers les revenus des chasseurs des Iles-de-la-Madeleine, d'après les données du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

«Chez nous, en Europe, c'est un dossier très délicat. On voit toujours les mêmes images qui laissent croire à une maltraitance des pauvres bêtes. Les citoyens ordinaires ne comprennent pas qu'il y a là aussi un enjeu économique», a souligné Christiane Bosmans, employée politique à la Délégation du Québec à Bruxelles.

Aux dires du premier ministre du Québec, le commissaire Dimas s'est montré ouvert à l'idée «d'explorer des pistes de solution» et même à «moduler» l'application du règlement sur l'embargo.

Mais il se fait tard pour renverser la vapeur, a reconnu M. Charest, soucieux de ne pas susciter de faux espoirs chez les chasseurs.

«En même temps, il ne faut pas baisser les bras. Ce n'est pas vrai que nous allons rater l'occasion de dire au commissaire européen que la chasse est conforme aux normes (...) Les Québécois doivent faire tout ce qu'il faut pour maintenir la chasse ouverte», a-t-il insisté.