Contrairement à la première évaluation avortée du projet de pipeline Énergie Est l'an dernier, l'Office national de l'énergie (ONÉ) envisage de tenir compte des émissions de gaz à effet de serre (GES) «en amont et en aval» dans la nouvelle mouture de l'examen fédéral sur le projet d'oléoduc de 4500 kilomètres décrié par les groupes environnementaux.

L'organisme fédéral a rendu publique en fin d'après-midi la liste provisoire des sujets, sous la forme de «questions», qui seront traités par le comité et qui pourront être abordés pendant les audiences. Ces questions vont s'avérer cruciales lors des audiences, puisque les propos et les preuves des participants devront être liés à celles-ci.

Cette liste provisoire pourrait toutefois être modifiée à la suite des commentaires émis par le public d'ici le 31 mai. Facteurs économiques et financiers, sécurité, du projet, rôle des autochtones, etc.: les thèmes abordés par l'ONÉ ratissent large. Au sujet des GES, le «comité d'audience désire obtenir une rétroaction portant précisément sur ce sujet», note le communiqué de l'ONÉ. L'organisme réalisera également une évaluation environnementale «qui a été élargie pour inclure des effets environnementaux possibles supplémentaires».

Pour Patrick Bonin, responsable de la campagne climat-Énergie à Greenpeace Canada, ce changement de cap de l'ONÉ ne change rien au fond du problème : l'évaluation du projet Énergie Est doit être suspendu en attendant la mise en place d'un nouveau processus d'évaluation environnementale. «Peu importe la liste des enjeux identifiés, ça ne donne absolument rien, parce que le problème est plus systémique et profond. C'est un problème de structure au sein de l'ONE», soutient-il.

La première audience pour l'évaluation du pipeline de l'entreprise TransCanada a avorté l'automne dernier à la suite de la récusation du panel chargé d'examiner le dossier. Quelques jours plus tôt, l'ONÉ avait dû suspendre les séances du comité d'audience à Montréal. Au coeur de la controverse : une rencontre en janvier 2015 de l'ex-premier ministre Jean Charest, alors consultant pour TransCanada, avec deux des commissaires des audiences de l'ONÉ.

« Le scandale de la rencontre secrète entre l'ONÉ et Jean Charest, qui a travaillé pour TransCanada, à laquelle assistait le président de l'ONÉ, n'était que la pointe de l'iceberg. Ça a montré à quel point il y avait des problèmes, et qu'il y a toujours des problèmes à l'ONÉ», affirme Patrick Bonin.

«Il ne fait aucun sens que cette évaluation continue d'aller de l'avant, alors qu'on a essentiellement le même système d'évaluation mis en place par le gouvernement Harper pour approuver rapidement des pipelines. Ce n'est pas en changeant trois têtes sur les trois commissaires remplacés pour évaluer le projet Énergie Est qu'on peut considérer que le ménage a été fait», maintient Patrick Bonin.

Les audiences sur le projet de pipeline devront reprendre depuis le début. De plus, le projet Énergie Est sera examiné en même temps que le réseau principal Est, un projet de gazoduc de 279 km en Ontario. Le projet Énergie Est doit transporter 1,1 million  de barils de pétrole brut de l'Alberta et de la Saskatchewan vers des raffineries dans l'Est du Canada. Selon Greenpeace Canada, les GES qui seront émis par la production de pétrole de sables bitumineux qui sera transporté par ce pipeline représentent l'équivalent de 7 millions de véhicules au pays.