Les environnementalistes refusent de connaître le potentiel des gisements du Québec, alors que le milieu des affaires «achète les yeux fermés» les prétentions des pétrolières, dénonce le ministre de l'Environnement, Yves-François Blanchet. «On débat sans les faits!»

Il convoquera bientôt un groupe d'experts pour obtenir la «meilleure synthèse scientifique disponible», a-t-il indiqué en interview avec La Presse.

Le ministre réagissait au manifeste publié hier par des environnementalistes, le co-porte-parole de Québec solidaire et les ex-députés péquistes Pierre Curzi et Lisette Lapointe. Cette missive répondait au manifeste pro-pétrole cosigné par l'ex-premier ministre péquiste Bernard Landry et des personnalités du monde des affaires.

Personne ne sait s'il y a vraiment du pétrole ni s'il serait profitable de l'exploiter, soutient le ministre. «On comprend l'intérêt des sociétés pétrolières de prétendre qu'il y a à Anticosti ou à Old Harry des ressources importantes. Dire cela permet de maintenir leur capital action à un bon niveau. Mais comme gouvernement, on ne doit pas s'inscrire dans cet exercice. On n'est pas censé acheter cela les yeux fermés», lance-t-il.

Bernard Landry prétendait qu'il y avait urgence pour Québec d'exploiter le gisement Old Harry dans le golfe du Saint-Laurent. La raison: Terre-Neuve exploiterait déjà le gisement, qui est situé des deux côtés de sa frontière avec le Québec. C'est faux, rappelle M. Blanchet. «À ma connaissance, Terre-Neuve est encore confrontée à des obstacles financiers dans la perspective d'exploiter Old Harry. Il n'y a pas d'exploitation», dit-il.

Et on connaît mal la nature de ce gisement, poursuit-il. Il pourrait contenir du sel. Il ne faudrait donc pas alimenter la «légende urbaine du vase communicant». «Ce n'est pas exact de dire que si Terre-Neuve plante un tuyau, cela va aspirer la partie québécoise de l'hypothétique ressource.»

De plus, s'il y a exploitation, elle ne se fera pas dans les prochaines années. Il faudra attendre les années 2020 au plus tôt.

Mais le ministre a néanmoins accueilli «avec un certain sourire» le manifeste de M. Landry. Il y voit une réponse «à un glissement» dans le discours des environnementalistes, qui s'opposent à l'exploration. Pour savoir ce que contient le sous-sol québécois, il faudra explorer. Cette étape est nécessaire, plaide le ministre. «Allons chercher l'information. On a le devoir d'aller voir ce qu'il y a.»

L'exploration est l'étape la plus risquée, expliquent les environnementalistes. M. Blanchet les accuse de présumer que l'encadrement sera déficient. «S'il y a de l'exploration sur l'île d'Anticosti, on sera dans leurs bottes pour les superviser et avoir un accès immédiat aux données», promet-il.

Si l'exploitation pétrolière s'avérait rentable et respectueuse de l'environnement, il faudra donc «sérieusement l'envisager», explique-t-il.