Le Québec aurait intérêt à déclasser sa centrale nucléaire Gentilly-2, à Bécancour, d'autant plus que l'industrie du démantèlement est en pleine croissance.

C'est l'un des arguments qu'invoque une coalition d'écologistes et d'artistes pour exiger que le futur gouvernement Marois confirme sans attendre sa décision de démanteler la seule centrale nucléaire québécoise.

«Il y a une expertise qui va être en demande dans le monde, c'est celle du déclassement des centrales nucléaires, affirme Karel Mayrand, de la Fondation David-Suzuki. Le marché va être plus important que celui des constructions.»

«Il y a 100 centrales à déclasser aux États-Unis, affirme Jacques Dagenais, qui milite depuis 1999 pour la fermeture de Gentilly-2. À 1 milliard chacune, c'est un marché de 100 milliards.»

Vérification faite, le marché du démantèlement des centrales sera effectivement très actif dans les prochaines décennies, mais surtout du côté de l'Europe.

L'Angleterre estime à 45 milliards de livres (70 milliards de dollars) le coût du démantèlement de ses 16 réacteurs. Le pays n'abandonne pas le nucléaire pour autant: huit nouvelles centrales pourraient être construites, afin notamment de réduire de 80% les émissions de gaz à effet de serre (GES) du pays.

En juin 2011, la Suisse a décidé de sortir du nucléaire et de renoncer à construire deux nouveaux réacteurs. Ses cinq réacteurs actuels génèrent 40% de l'électricité du pays. Ils devraient fermer progressivement d'ici à 2034. Le coût de leur démantèlement est estimé à 20,6 milliards de francs suisses (21 milliards de dollars).

L'Allemagne aussi a annoncé qu'elle sortait du nucléaire. L'an dernier, le gouvernement a décidé de fermer ses 17 centrales d'ici à 2022. Elles produisent 18% de l'électricité allemande.

Notons que Gentilly-2 produit au plus 2% de l'électricité québécoise et que le Québec a actuellement des surplus de production.

Aux États-Unis, l'industrie du démantèlement est promise à un bel avenir. Depuis 1964, 28 réacteurs ont été démantelés tandis que 104 sont en exploitation.

Selon les données officielles de la Commission de réglementation nucléaire américaine (qui datent de 1999), il faut prévoir au minimum 370 millions pour chaque démantèlement.

Mais, comme le souligne Jim Riccio, responsable de la campagne antinucléaire de Greenpeace aux États-Unis, plusieurs réacteurs n'ont pas été démantelés complètement et demandent encore du travail.

«En quelque sorte, c'est une bonne chose parce les travailleurs sont moins exposés à la radiation, dit-il. On emprisonne les réacteurs dans le béton et on attend que la radiation baisse.»

Et par ailleurs, la plupart des centrales ont vu leur permis prolongé, ce qui retardera le moment de leur démantèlement. «On a maintenant des centrales prévues pour 40 ans qui ont été prolongées à 60 ou 80 ans», dit M. Riccio.