Des opposants au gaz de schiste rassemblés dans un village de la campagne anglaise se félicitaient vendredi d'avoir obtenu une première «victoire», après la décision de l'entreprise chargée des forages exploratoires de réduire provisoirement ses activités.

Jusqu'à un millier de militants venus de tout le Royaume-Uni étaient attendus vendredi à Balcombe, dans le West Sussex, région du sud-est de l'Angleterre, pour un camp de six jours destiné à protester contre la technique controversée de la fracturation hydraulique.

Ce paisible village est depuis quelques semaines le centre d'une intense mobilisation des écologistes, qui redoutent que les forages exploratoires qui ont commencé sur place débouchent sur le recours à cette technique d'exploitation.

En prévision de ce rassemblement et de crainte de débordements, la société britannique Cuadrilla opérant sur le site, a décidé, en concertation avec la police, de réduire provisoirement ses activités.

«Notre principale préoccupation est la sécurité de nos équipes, des habitants de Balcombe et des manifestants, à la suite des menaces d'actions directes contre le site d'exploration», a expliqué l'entreprise spécialisée dans la fracturation hydraulique.

«Nous reprendrons la totalité de nos activités dès que nous pourrons le faire en toute sécurité», a-t-elle précisé, alors que son directeur exécutif, Francis Egan, s'est déclaré «assez inquiet» à propos de la sécurité du site, sur la chaîne de télévision ITV News.

L'annonce de Cuadrilla a aussitôt été saluée par les militants sur place, qui attendent des renforts à l'occasion de ce rassemblement estampillé «No Dash for Gas» («Pas de ruée vers le gaz»).

Parmi eux, la créatrice de mode Vivienne Westwood, résolument «anti-fracking», qui regrette qu'il n'y ait eu «aucun débat» et estime que Cuadrilla et le gouvernement «seront les seuls à profiter» des forages.

Pour éviter les risques de confrontation, le site des forages a été sécurisé avec des clôtures en barbelés. La police a déjà procédé à une quarantaine d'arrestations depuis le début des manifestations il y a trois semaines.

«Nous allons continuer à autoriser les manifestations pacifiques, mais les nouveaux venus sur le site doivent savoir qu'en cas de délit, nous enquêterons et ils seront arrêtés», a prévenu le commissaire Lawrence Hobbs, de la police du Sussex.

Sur le site du camp, à plus d'un kilomètre du lieu des forages, les militants étaient occupés vendredi à dresser des chapiteaux, des tentes, installer des toilettes et un coin-cuisine.

Le mouvement de protestation à Balcombe, un bastion du parti conservateur, mêle habitants de la région et militants écologistes et a reçu le soutien de célébrités comme Bianca Jagger, l'ex-épouse du chanteur des Rolling Stones, outre Vivienne Westwood.

Mais certains résidents de Balcombe commencent à «en avoir marre» des manifestations, à l'image de Derek Earl, 71 ans. «Je ne suis ni pour ni contre le fracking mais j'en ai marre du comportement des militants anti-fracking. La plupart ont une vision étriquée et n'écoutent même pas les arguments des autres. Ils disent avoir le soutien écrasant de la population du village, mais ce n'est pas le cas.»

Avec trois mois de retard, les forages d'exploration ont débuté le 2 août, quand Cuadrilla a commencé à creuser un puits vertical de 915 mètres de profondeur dans l'espoir de trouver du gaz de schiste.

La fracturation hydraulique, qui utilise des quantités énormes d'eau pour libérer le gaz de la roche, est jugée polluante par les défenseurs de l'environnement. Elle est interdite en France, mais mise en oeuvre aux États-Unis.

Le premier ministre britannique David Cameron a affirmé que le Royaume-Uni ferait une «grave erreur» s'il tournait le dos au gaz de schiste. Il a estimé que la technique de la fracturation hydraulique ne causerait que «des changements très mineurs au paysage», qu'elle pouvait «réellement faire baisser les factures d'énergie» et créer des dizaines de milliers d'emplois.

L'Église d'Angleterre, sans se prononcer ouvertement en faveur des forages, a également pointé vendredi les coûts énergétiques élevés et le besoin de trouver de nouvelles sources d'énergie.