L'ancien chef de cabinet du premier ministre Jean Charest, Stéphane Bertrand, a participé à la création, l'an dernier, de l'Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ), le lobby de l'industrie du gaz de schiste.

«J'ai travaillé à regrouper les acteurs. Je pensais que c'était une bonne idée qu'ils puissent se regrouper», a expliqué M. Bertrand à La Presse, hier.

Son travail était bénévole. L'ancien directeur de cabinet dit s'être retiré de l'APGQ dès sa fondation et n'avoir assisté à aucune réunion par la suite. «Je ne fais pas de lobbyisme» pour cette industrie, a-t-il affirmé. Il n'exclut toutefois pas que des représentants du gouvernement aient pu lui «poser des questions» sur le gaz de schiste au cours des derniers mois.

«C'est vrai que j'ai été au gouvernement mais, avant ça, j'étais dans le secteur de l'énergie», a-t-il affirmé. Il n'est donc pas étonnant, selon lui, qu'il soit retourné à ses anciennes amours et ait pris part à la création de l'APGQ.

Stéphane Bertrand a été directeur de cabinet de M. Charest de 2003 à 2007. Il était auparavant vice-président de Gaz Métro, une entreprise qui s'intéresse à l'exploitation du gaz de schiste.

Depuis novembre 2007, Stéphane Bertrand est directeur général du Congrès mondial de l'énergie, qui réunira à Montréal, du 12 au 16 septembre, de nombreux acteurs importants de cette industrie et des représentants gouvernementaux.

Ce congrès est organisé tous les trois ans par le Conseil mondial de l'énergie. André Caillé, ancien patron de Gaz Métro puis d'Hydro-Québec, a présidé cet organisme de 2004 à 2007. Il est aujourd'hui président de l'APGQ et administrateur de Junex, une société active au Québec dans la prospection de gaz de schiste. Il sera l'un des conférenciers du congrès mondial, tout comme la ministre des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau. Selon Stéphane Bertrand, la question de l'exploitation du gaz de schiste y sera abordée, mais très peu.

À compter du 14 septembre, alors que se déroulera le congrès, l'APGQ lancera son offensive de communication sur le gaz de schiste. Et d'ici là, la ministre Normandeau doit présenter un «document d'orientation» favorable à cette filière énergétique.

L'avocat de Jean Charest à la commission Bastarache, Me André Ryan, président de la commission juridique du PLQ, a participé à la création de l'APGQ et a assisté à la première assemblée des membres, le 10 juin 2009. Il dit ne plus être intervenu dans le dossier depuis.

Comme La Presse l'a révélé cette semaine, l'APGQ vient d'embaucher un nouveau directeur général proche du pouvoir, Stéphane Gosselin, qui était jusqu'à vendredi dernier directeur de cabinet du ministre du Développement économique, Clément Gignac. Il a occupé les mêmes fonctions dans le passé à l'Environnement et aux Ressources naturelles.

Pour concevoir sa campagne d'information, l'APGQ a fait appel au cabinet de relations publiques National, qui a à cette fin embauché deux ex-conseillers politiques du gouvernement: Martin Daraiche, qui a été au bureau de Mme Normandeau puis de M. Charest entre 2006 et 2008, et Lisa Lavoie, directrice de cabinet adjointe à l'Environnement jusqu'à tout récemment.

Selon le registre des lobbyistes, Daniel Bernier, chef de cabinet au gouvernement Charest jusqu'en 2005, représente les intérêts de Talisman auprès du gouvernement. Cette entreprise albertaine fait des forages de prospection de gaz de schiste au Québec et envisage de passer à l'exploitation dès l'an prochain. Daniel Bernier est vice-président de GVM, une firme de communication présidée par François Pilote, ami de longue date de Jean Charest et l'un de ses anciens organisateurs.

L'APGQ compte une quarantaine de représentants inscrits au registre des lobbyistes, dont le président de Gastem, Raymond Savoie, ministre libéral des Mines de 1986 à 1990 et du Revenu de 1990 à 1994.