L'énergie solaire est très prometteuse au Québec, mais on n'a pas besoin ici d'un programme solaire aussi onéreux que celui qui suscite la controverse actuellement en Ontario, selon une chercheuse de l'Université Concordia qui a produit un rapport pour Greenpeace.

Le rapport publié hier s'intitule justement Le potentiel des énergies solaires au Québec. Parce qu'il y a plusieurs façons de capter l'énergie du soleil, et certaines sont très abordables et sont rentabilisées facilement, selon l'auteure du rapport, Diane Bastien, étudiante au doctorat en génie du bâtiment à l'Université Concordia.

Le Québec est très ensoleillé, assure Mme Bastien. Plus que l'Allemagne, qui est pourtant devenue un leader de l'énergie solaire.

Le «problème» québécois: l'énergie hydroélectrique est abondante et pas chère.

Les technologies solaires les plus coûteuses font appel à des cellules photovoltaïques qui transforment la lumière en électricité. Mais on peut aussi convertir l'énergie solaire en chaleur, même en plein hiver, à peu de frais. «Certains capteurs solaires à air se remboursent en trois ans ou moins», affirme Mme Bastien.

Ces capteurs sont de simples plaques de tôle perforée d'une couleur sombre qui sont posés sur un mur exposé au soleil. L'air s'y réchauffe avant d'être soufflé à l'intérieur du bâtiment. La société Bombardier a installé un tel «mur solaire» à Saint-Laurent.

Un nouveau pavillon de l'Université Concordia superpose sur le même pan de mur des capteurs photovoltaïques et à air. Selon Mme Bastien, les deux dispositifs produisent ensemble 100 000 watts sur une surface de 288 mètres carrés.

Il est aussi relativement peu coûteux de concevoir les maisons de façon à ce qu'elles profitent au maximum des rayons du soleil afin de diminuer jusqu'à 60% leurs coûts de chauffage. Cela a été démontré dans quelques maisons québécoises citées dans le rapport.

Ambitieux programme

Il y a donc des façons économiques d'exploiter l'énergie solaire, sans avoir à copier l'Ontario, qui rachète l'électricité solaire produite par des particuliers à des tarifs de 40 à 80 cents du kilowattheure. C'est 6 à 12 fois le tarif résidentiel de l'électricité au Québec.

Mais, note Mme Bastien, l'Ontario fait face au défi de remplacer rapidement ses centrales au charbon par de l'énergie propre et pouvait payer l'énergie jusqu'à 1,90$ le kilowattheure pendant sa pointe estivale. En plus, la province voulait faire démarrer une industrie solaire sur son territoire, pour contrer les effets de la crise dans le secteur automobile.

Cet ambitieux programme ontarien d'énergie verte est un des principaux enjeux de la campagne électorale qui vient de démarrer dans la province. Le programme a été lancé par les libéraux du premier ministre Dalton McGuinty, mais le chef du Parti conservateur Tim Hudak a annoncé qu'il s'en débarrasserait.

«Je ne crois pas qu'il faille adopter des tarifs comme en Ontario, dit Mme Bastien. Mais il faudrait avoir une petite carotte pour encourager les gens qui sont prêts à adopter cette nouvelle technologie et encourager à long terme la croissance de l'industrie solaire au Québec.»

Le Québec n'est pas dans la même situation que l'Ontario, reconnaît d'emblée Greenpeace. Mais ce n'est pas une raison pour s'empêcher de capter l'énergie solaire là où c'est rentable et surtout quand elle remplace les énergies fossiles, comme dans le chauffage, par exemple, ou même dans les transports. «C'est vrai qu'on a des surplus jusqu'en 2023, dit Éric Darier, le directeur de Greenpeace. Mais il faut regarder comment électrifier les transports.»

M. Darier rappelle aussi que les énergies fossiles sont généreusement subventionnées, à hauteur de 1,7 milliard par année au Canada. Il croit que le Québec devrait adopter des mesures fiscales pour encourager l'énergie solaire dans son prochain budget.