En mathématique du climat, la différence entre 1,5 et 2 degrés Celsius est bien plus grande que 0,5.

Pour les petits pays insulaires, ce demi-degré peut faire la différence entre la vie et la mort. Pour les plus grands pays, il faut déterminer ce qui est réaliste et ce qui ne l'est pas pour limiter le réchauffement climatique.

La plus grande question à poser est : quelle est la limite de réchauffement à ne pas franchir? En 2010, des négociateurs internationaux ont formellement adopté l'objectif de limiter le réchauffement du climat mondial à deux degrés Celsius au-dessus de la moyenne préindustrielle. La Terre s'est déjà réchauffée de près d'un degré.

La limite du réchauffement a le potentiel de faire échouer les discussions actuellement en cours à la Conférence des Nations unies sur le climat, à Paris.

Les négociateurs n'arrivent pas, pour le moment, à s'entendre sur un chiffre.

Une question de survie pour les plus vulnérables

De petits pays insulaires, comme les îles Marshall, les Tuvalu ou Sainte-Lucie, et quelques autres pays revendiquent 1,5 degré. Pour ces pays, c'est une question de survie, disent-ils, puisqu'ils sont beaucoup plus vulnérables à la hausse du niveau des océans. Leurs villes risquent d'être inondées, et les récoltes pourraient être tuées par l'eau salée.

« C'est une bataille qui ne devrait pas porter sur les nombres, a fait valoir le ministre du Développement durable de Sainte-Lucie, James Fletcher. Elle devrait porter sur les vies. On le lutte pas pour des chiffres, on lutte pour des vies. »

Les scientifiques affirment que les deux cibles, 1,5 ou 2 degrés, sont arbitraires, mais que de limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius pourrait améliorer les chances de survie des récifs de corail, ralentir l'augmentation du nombre de catastrophes naturelles et aider la planète à éviter des niveaux de réchauffement irréversibles, redoutés et dommageables.

Mesures radicales

Limiter le réchauffement à 1,5 degré, pour certains pays, signifierait de prendre des mesures radicales pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. La secrétaire exécutive de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, Christiana Figueres, et le président de la conférence et ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, sont optimistes sur le fait qu'un compromis peut émerger. Jusqu'à maintenant, les négociateurs affirment qu'ils peuvent relever le défi.

Les différents aspects d'une éventuelle entente dépendront en partie de l'objectif fixé.

En entrevue, Mme Figueres a laissé entendre qu'elle croyait possible que les pays reconnaissent la grande vulnérabilité de certains pays.

Le négociateur américain Todd Stern a rapporté que sa délégation avait discuté de la position des États-Unis avec les petites îles. « Nous n'avons rien arrêté encore, mais nous comprenons les inquiétudes de ces pays et nous pensons qu'elles sont légitimes. »

Vers une hausse de 4,5 degrés

Mais encore faut-il que l'objectif fixé soit réaliste.

Andrew Jones, codirecteur de la firme Climate Interactive, a créé des simulations informatiques pour calculer de combien la Terre se réchaufferait en fonction de la quantité de carbone émis dans l'atmosphère. Selon lui, il serait difficile de limiter le réchauffement à deux degrés, et « très difficile » de le garder sous la barre du 1,5. Les engagements actuels des divers pays ne limitent le réchauffement qu'à 3,5 degrés. La trajectoire actuelle de la Terre l'amène vers une hausse de 4,5 degrés.

En guise d'exemple, pour atteindre la cible de deux degrés, les États-Unis devront réduire de 4,1% par année leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030. Pour un demi-degré de moins, il leur faut les réduire de 6,2% par année. Le ralentissement d'émissions le plus rapide jamais vu était de 4% par année, durant les années 1970, lorsque la France a fait la transition vers la production nucléaire d'électricité.