Les grands glaciers de l'Ouest de l'Antarctique s'effondreraient si ceux du bassin Amundsen, plus petits, étaient totalement déstabilisés sous l'effet du réchauffement, un scénario qui verrait le niveau des océans augmenter de trois mètres sur plusieurs siècles.

Une étude des scientifiques de l'Institut Potsdam sur la recherche climatique publiée lundi dans les Comptes-rendus de l'académie américaine des sciences (PNAS) souligne que les glaciers de l'Amundsen perdent déjà de leur stabilité. Ils seraient le premier «verrou» à sauter dans le système climatique de l'Antarctique, expliquent-ils.

Cette étude montre pour la première fois les conséquences inévitables d'un tel effondrement, selon ces climatologues.

Les simulations effectuées par ordinateur révèlent que la fonte des glaces pendant quelques décennies de réchauffement des océans peut déclencher un mouvement de fonte qui se poursuit ensuite pendant des siècles, voire des millénaires, soulignent-ils.

«Une fois que les glaciers sont perturbés, ce qui est le cas aujourd'hui, ils répondent de manière non-linéaire. Ainsi, leur effondrement se produit relativement soudainement après une longue période de stabilité apparente durant laquelle peu de changements sont observés», explique Johannes Feldmann, le principal auteur.

La même dynamique existe par exemple dans la forêt amazonienne ou le système de la mousson en Inde.

Dans plusieurs parties de l'Antarctique, le flot naturel de la glace glissant dans l'océan devrait augmenter de façon importante et permanente, prédisent ces scientifiques.

Alors que les océans se réchauffent, les eaux plus chaudes font lentement fondre les plaques de glace se trouvant sous la surface et qui sont la prolongation des glaciers terrestres. Ceux-ci s'en trouvent ainsi déstabilisés.

«Selon nos simulations, 60 ans de fonte des glaces au rythme actuellement observé dans l'Antarctique sont suffisants pour déclencher un processus irréversible qui perdurera pendant des centaines ou des milliers d'années. Cela entraînera une montée du niveau des océans de trois mètres environ», explique Johannes Feldmann, notant qu'il s'agit «d'un processus long».

Mais, a-t-il insisté «ce processus a déjà probablement commencé».

«Jusqu'à présent nous ne disposons pas d'assez d'indications pour dire si la déstabilisation des glaciers d'Amundsen est actuellement due aux émissions de gaz à effet de serre et au réchauffement du climat qui en résulte», a toutefois relevé Anders Levermann, également chercheur à l'Institut Potsdam et co-auteur de la recherche.

«Mais il ne fait aucun doute qu'une augmentation de ces émissions ne peut qu'accroître le risque d'un effondrement des glaciers de l'Antarctique occidental et d'une montée irréversible du niveau des océans», selon lui.

L'épaisseur des glaces flottant autour de l'Antarctique, qui agissent comme un rempart contre l'effondrement des glaciers permanents recouvrant ce continent, s'est réduite de près de 20% à certains endroits ces deux dernières décennies et ce phénomène s'accélère, selon une autre recherche publiée en mars dernier dans la revue Science.