À six semaines de la conférence de Paris sur le climat, les représentants de 195 pays ont entamé lundi, avec un «sentiment d'urgence», mais aussi des dissensions, une dernière semaine de négociation en vue d'un accord mondial pour freiner le réchauffement de la planète.

À l'ouverture de cette ultime session à Bonn, siège de la Convention de l'ONU sur les changements climatiques (Cnuccc), de nombreux pays en développement ont critiqué le nouveau texte devant servir de base aux discussions, tout en réaffirmant leur confiance dans le processus et dans les deux coprésidents des débats.

«Le texte est extrêmement déséquilibré», a déclaré à la session d'ouverture la déléguée sud-africaine Nozipho Mxakato-Diseko, au nom du groupe G77 et de la Chine, qui regroupe 134 pays émergents et en développement.

Il «ignore complètement les propositions du groupe G77 sur les financements», a expliqué à l'AFP Gurdial Singh Nijar, porte-parole d'un des sous-groupes du G77.

La déléguée sud-africaine a toutefois salué l'écoute dont ont fait preuve les coprésidents, l'Algérien Ahmed Djoghlaf et l'Américain Daniel Reifsnyder, qui ont proposé aux pays de faire des ajouts au texte avant que les négociations ne débutent réellement.

Le groupe «s'engage à travailler de manière constructive et disciplinée, et avec retenue en limitant nos ajouts aux propositions les plus essentielles», a dit Mme Mxakato-Diseko.

Face à la lenteur des discussions, les deux coprésidents avaient été mandatés début septembre par les pays pour proposer un texte plus clair et plus succinct, ainsi réduit de 80 à 20 pages.

«Manque d'ambition»

Laurence Tubiana, la négociatrice française, a reconnu lundi en séance plénière qu'en l'état, il manquait «d'ambition sur tous les points». Elle s'est voulue rassurante: «Nous sommes ici pour corriger ses faiblesses».

L'ambassadrice française a toutefois mis en garde les pays sur le compte à rebours désormais enclenché jusqu'à Paris. «Le temps presse», a-t-elle dit, en appelant à la responsabilité de chacun pour aller à l'essentiel, les négociations climatiques s'enlisant très fréquemment dans des débats de procédure.

«Nous voulons tous avoir un texte à la fin de la semaine», ont souligné les coprésidents, qui avant l'ouverture, évoquaient «le sentiment partagé qu'il y a urgence».

Le futur accord de Paris doit être un tournant dans la lutte pour contenir les émissions de gaz à effet de serre, pour l'essentiel liés à la combustion d'énergies fossiles. Il doit aussi prendre en compte les besoins d'adaptation aux impacts du réchauffement.

À ce stade, 150 Etats ont remis à l'ONU leur «contribution» pour réduire leurs émissions à horizon 2025-2030 (dernier en date, l'Ouganda, vendredi), en vue de la conférence de Paris, prévue du 30 novembre au 11 décembre.

Cette forte participation réjouit les promoteurs d'un accord. Mais l'ensemble de ces promesses met encore la terre sur une trajectoire de +2,7°C voire 3°. C'est mieux que les +4 à 5° qui s'annoncent si rien n'est fait, mais loin de l'objectif de 2° au-delà duquel la science promet une multiplication d'événements extrêmes et des conséquences irréversibles sur les espèces, les océans et les économies.

En outre, beaucoup de pays en développement exigent un soutien financier et technologique pour réduire leurs émissions et faire face aux impacts qu'ils ressentent déjà.

Particulièrement attendue: la concrétisation de la promesse, faite en 2009, de 100 milliards d'aide climatique annuelle des pays du nord pour les pays du sud d'ici à 2020.

Plusieurs annonces ont été faites récemment, devant l'ONU et à la réunion financière qui s'est tenue à Lima, avec des rallonges promises par des institutions bancaires et des pays comme la France ou le Royaume-Uni. Mais les pays en voie de développement ne veulent pas s'en tenir aux promesses et souhaitent une feuille de route d'ici à 2020.

Pour autant, de sommets bilatéraux en réunions à l'ONU en passant par les déclarations des certains milieux financiers en faveur du développement d'économies «bas-carbone», ces dernières semaines ont fait avancer le débat climatique, faisant souffler un vent d'optimisme mesuré.

Les deux principaux pollueurs, la Chine et les États-Unis se sont en particulier mis d'accord sur la nécessité d'accroître «sur la durée» les ambitions en matière de réduction des gaz à effet de serre (GES).

Les négociateurs ont d'ailleurs dans les tuyaux un mécanisme de révision des efforts à la hausse. Mais là encore, reste à déterminer sa nature et son caractère contraignant.