Entre Barack Obama et Xi Jinping, les sujets de discorde sont nombreux, la complicité est loin d'être évidente. Les présidents américains et chinois, qui se retrouvent cette semaine à Pékin, espèrent cependant avancer sur un point : le climat.

«Nous avons une responsabilité particulière, nous devons montrer la voie», a lancé M. Obama lors d'un sommet climat fin septembre à New York. De son côté, le vice-premier ministre chinois Zhang Gaoli a évoqué l'objectif d'un pic des émissions chinoises - année à partir de laquelle les émissions commenceront à décroître -, sujet longtemps tabou.

Le constat des scientifiques est sans appel : les efforts actuels sont insuffisants pour limiter la hausse de la température mondiale à + 2 °C. Et si les deux plus grands émetteurs de CO2 de la planète - 45 % du total des émissions à eux deux - affichent leur détermination à avancer vers l'objectif d'un accord mondial à Paris en 2015, les obstacles sont nombreux, de part et d'autre.

Le souvenir du sommet de Copenhague, il y a cinq ans, est vif. Après des semaines de négociations stériles, les entretiens de dernière minute entre Barack Obama et le premier ministre Wen Jiabao avaient accouché d'un texte a minima, loin des ambitions initialement affichées.

À l'approche du grand rendez-vous parisien de décembre 2015 - auquel les chefs d'État ne sont pas conviés -, les discussions entre Pékin et Washington ont changé de nature. Sur le plan politique, mais aussi dans la recherche de coopération technologique sur des secteurs tels que le stockage de l'électricité, les véhicules propres, les réseaux de transmission de l'électricité.

«Il y a un dialogue intense, sans précédent», souligne Laurence Tubiana, représentante spéciale de la France pour la conférence de Paris 2015. « C'est une leçon apprise de Copenhague. C'est aussi véritablement la progression du débat chinois en interne, lié en particulier à la perception du risque climatique», ajoute-t-elle.

«Les deux dirigeants sont décidés à avoir un accord, tout l'enjeu est de savoir où ils placent la barre», poursuit-elle.

M. Obama tient à inscrire à son bilan un accord international sur un sujet dont il avait fait une des priorités de sa campagne en 2008. La conférence de Paris, qui rassemblera 195 pays sous l'égide de l'ONU, est sa dernière chance d'y parvenir avant de quitter la Maison-Blanche début 2017.

Du côté chinois, «il y a une énorme pression sur les questions environnementales, dont certaines ont une résonance climatique», souligne Kenneth Lieberthal, spécialiste de la Chine au sein de la Brookings Institution à Washington. À ce stade, il est «impossible de dire jusqu'où le président Xi est prêt à aller», tempère-t-il cependant.

Obama ne peut compter sur le Congrès

Pour Jennifer Morgan, du World Resources Institute (WRI), ces intenses discussions sino-américaines sur le climat sont une bonne nouvelle. Cependant, met-elle en garde, elles devront s'inscrire dans «une spirale vers le haut» et ne pas se résumer à la recherche du «plus petit dénominateur commun».

L'Union européenne, qui vient d'annoncer un objectif pour 2030 (-40 % d'émissions par rapport à 1990) nettement supérieur à l'effort américain, devra en particulier mettre la pression sur les deux partenaires, estime-t-elle.

L'annonce d'objectifs chiffrés est attendue d'ici la fin du premier trimestre 2015, au plus tard à l'été. Pékin n'a avancé aucune date, mais les négociateurs américains et européens tablent sur un pic des émissions chinoises quelque part entre 2025 et 2030. Les États-Unis devraient avancer un chiffre de réduction de leurs émissions d'ici 2025 (avec 2005 comme année de référence), se situant entre -20 % et -30 %.

La première rencontre entre Obama et Xi, en juin 2013 en Californie, dans un cadre informel, avait débouché sur peu de résultats concrets à l'exception d'un engagement commun à réduire l'utilisation des hydrofluorocarbones (HFC), puissants gaz à effet de serre utilisés dans la réfrigération et la climatisation. D'autres annonces pourraient être faites mercredi à Pékin à l'issue des rencontres entre les deux hommes.

Une chose est certaine : M. Obama ne pourra s'appuyer sur le Congrès, où les républicains, qui comptent nombre de climato-sceptiques dans leurs rangs, sont désormais en position de force.

Le républicain Mitch McConnell, prochain leader du Sénat, qui dénonce inlassablement la «guerre contre le charbon» menée par le président démocrate, veut réduire les financements de l'Agence de protection de l'environnement (EPA) sur laquelle Obama s'appuie pour mettre en place de nouvelles normes de régulation sur les centrales thermiques.

Interrogé récemment sur la réalité du changement climatique, le nouvel homme fort du Congrès américain a répondu : «Je ne suis pas un scientifique».