La Commission européenne a appelé mercredi l'UE à doubler la réduction de ses émissions de CO2 d'ici à en 2030 pour lutter contre le réchauffement climatique, mais la partie s'annonce difficile, car les États européens veulent sauvegarder la compétitivité de leurs industries et craignent une montée des coûts de l'électricité.

L'objectif de 40 % de réduction du CO2 et des autres gaz à effet de serre serait contraignant et réalisé uniquement avec des mesures prises au niveau national par les États et leurs industriels.

Il est complété d'un objectif de 27 % contraignant au niveau européen pour la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique de l'UE et par un objectif indicatif de 25 % pour les économies d'énergies, qui devra être finalisé à l'automne.

La proposition de la Commission laisse aux États la faculté de décider s'ils veulent exploiter leurs réserves de gaz de schiste. Elle renforce enfin le marché des quotas d'émissions (ETS), principal instrument financier de la politique climatique de l'UE, avec la constitution en 2021 d'un mécanisme de réserve permanent représentant de 12 % des certificats en circulation à cette période.

«Nous proposons un cap à long terme ambitieux et réalisable», a soutenu le président de l'exécutif bruxellois.

La décision de le suivre appartient aux dirigeants européens, a-t-il souligné. Ils doivent se prononcer lors d'un sommet les 20 et 21 mars à Bruxelles et l'unanimité devra être obtenue, car la composition du bouquet énergétique est une prérogative nationale.

La responsable de l'ONU pour le climat, Christiana Figueres, a salué le «signal positif» envoyé par Bruxelles.

Les objectifs proposés par la Commission sont en ligne avec la position des commissions Environnement et Industrie du Parlement européen, qui se sont prononcées pour une réduction contraignante de 40 % des émissions de gaz à effet de serre.

Mais ils sont jugés insuffisants par les organisations de défense de l'environnement qui ont manifesté leur déception. L'UE a réduit ses émissions de 18 % en 2012 et sans nouvel effort, elle les aura réduites de 32 % en 2030, selon les estimations de la Commission.

Nicolas Hulot, envoyé spécial du président français François Hollande pour la protection de la planète, a estimé que l'UE devrait réduire ses émissions d'au moins 50 % en 2030. Greenpeace et le Réseau Action pour le Climat réclament une réduction d'au moins 55 % par rapport aux niveaux de 1990 si l'UE veut tenir son engagement de les réduire de 85 à 90 % pour 2050.

Négociations difficiles

Ces critiques irritent la Commission européenne. «Cette proposition est crédible et réalisable, si tout le monde fait un effort sérieux. Elle fait la part des choses entre ceux qui veulent bâtir des châteaux en Espagne et ceux qui ne veulent rien faire, car les autres grands pollueurs ne font rien», a confié à l'AFP un membre de l'exécutif bruxellois.

Les négociations entre les gouvernements s'annoncent difficiles au vu des pressions exercées sur les commissaires.

M. Barroso a dû batailler jusqu'à mardi soir pour obtenir l'objectif contraignant de 40 % de réduction par rapport aux niveaux de 1990 préconisé par la commissaire au Climat Connie Hedegaard.

Plusieurs commissaires, notamment l'Allemand Günther Oettinger (Énergie), l'Italien Antonio Tajani (Industrie) et le Polonais Janusz Lewadowski (Budget), voulaient en effet le limiter à 35 % pour défendre la compétitivité industrielle de l'UE. Leurs positions reflètent celles des pays et des secteurs de l'industrie, gros consommateurs d'énergie opposés à tout objectif contraignant, a souligné un responsable européen.

Les pressions ont également été intenses de la part du Royaume-Uni et de l'Espagne pour refuser toute contrainte nationale sur les énergies renouvelables et la plupart des pays de l'UE freinent leurs soutiens au solaire et à l'éolien, jugés responsables de l'augmentation des factures d'électricité.

La Commission européenne se défend également contre les virulentes critiques des défenseurs de l'Environnement contre son renoncement à réglementer l'exploitation du  gaz de schiste. Le faire aurait signifié aller contre la volonté du Royaume-Uni et de la Pologne et aurait condamné le paquet Énergie-Climat 2030 à l'échec, a-t-on expliqué de source européenne.