La pire tempête qu'ait connue l'Arctique en 1000 ans viendrait confirmer les prévisions des spécialistes qui croient que les changements climatiques amèneront des conditions météorologiques d'une violence imprévisible et sans précédent, révèle un rapport.

Les résultats de l'étude, publiée lundi dans les prestigieux Actes de l'Académie nationale des sciences, concordent avec les craintes entourant le réchauffement climatique, selon le scientifique de l'université Queen's et coauteur de l'étude, John Smol.

L'équipe de M. Smol a étudié une tempête qui a frappé la côté nord-ouest du Canada, près de Tuktoyaktuk, en septembre 1999. Les chercheurs ont découvert que la force des vents, combinée à un niveau de la mer qui était plus bas qu'à l'habitude, ont contribué à former un torrent d'eau tellement puissant que ses effets se font encore ressentir aujourd'hui.

Cette vague d'eau salée a tué plus de la moitié des arbrisseaux sur une distance de 20 kilomètres à partir de la côte. Le tiers des arbrisseaux qui n'ont pas été éliminés sur le coup sont morts au cours des cinq années suivant la tempête.

Les résidus de sel présents dans le sol continuent de stopper le renouvellement de la végétation dans le secteur. Les niveaux de sel des lacs touchés par la catastrophe sont encore plus élevés que ceux qui n'ont pas été submergés en 1999.

La tempête a été dramatique. Pour qu'il soit établi qu'elle est le résultat des changements climatiques, toutefois, il faudrait qu'elle soit comparée avec d'autres. Les rapports météorologiques de l'Arctique, cependant, ne remontent pas à très loin. Même l'analyse des anneaux de croissance des arbres ne permet que de remonter de 80 années dans le temps.

Résultat: les chercheurs ont dû s'en remettre aux sédiments des lacs, qui permettent d'établir un registre clair et précis des conditions météorologiques.

«Ce sont de véritables livres d'histoire, a dit John Smol. Nous pouvons reconstruire les changements environnementaux du passé.»

L'étude de plantes fossilisées dans les sédiments a permis à M. Smol et à son équipe de conclure au caractère unique du flot d'eau salée de 1999. «Les sédiments nous ont permis de faire une analyse qui remonte à près de 1000 ans. Nous savons, grâce à cette information, que cet événement était d'une ampleur sans précédent.»

Une situation à laquelle il faut s'attendre, selon les prévisions en matière de climat.

«Tous les modèles prédisent que cela arrivera», a dit M. Smol. «C'est un autre triste exemple des événements qui se produiront dans le futur, une autre démonstration des effets des changements climatiques sur l'environnement.»

L'étude a des répercussions importantes pour les communautés de l'Arctique, qui sont presque toutes situées sur la côte.

John Smol précise que les changements climatiques évoluent plus rapidement dans l'Arctique que dans le reste du monde. Plusieurs scientifiques croient que la situation dans le Nord est un avant-goût de ce qui se produira sur le reste de la planète.

«Ce ne sont pas de bonnes nouvelles, croit M. Smol. C'est un problème auquel seront confrontées les communautés côtières du monde entier.»