Les États-Unis, qui projettent de sabrer leur budget alloué à la lutte contre le changement climatique, ont imposé samedi leur vision climato-sceptique à la gouvernance mondiale en refusant de mentionner l'accord de Paris dans le communiqué du G20 Finances.

Réunis dans la cité thermale allemande de Baden-Baden, les ministres des pays les plus puissants du monde ont bataillé deux jours, mais finalement leur communiqué ne réitérera pas l'engagement en faveur du climat pris lors du sommet de Hangzhou en septembre 2016, quand les chefs d'État s'engageaient à se dépêcher d'adhérer à l'accord de Paris.

Depuis, Donald Trump, qui a affirmé par le passé que le réchauffement climatique n'était qu'une invention des Chinois, a été élu président des États-Unis et n'a pas ménagé ses sorties climato-sceptiques.

Ce climato-scepticisme affiché a pris forme jeudi dans le projet de budget américain: au niveau national comme international, des coupes claires sont prévues dans la quasi-totalité des fonds consacrés à la lutte contre le changement climatique.

Le secrétaire au Trésor américain Steven Mnuchin a expliqué avoir refusé toute mention de l'accord dans le communiqué de Baden-Baden d'abord parce que les questions environnementales n'étaient «pas de son domaine».

«Le président Trump est en train de regarder l'accord de Paris et les autres traités, et le gouvernement aura une opinion dans ce domaine en même temps qu'il redéfinira sa politique», a déclaré Steven Mnuchin, jugeant que cette question est plus du ressort des chefs d'État et de gouvernement du G20 que des ministres des Finances.

Les défenseurs de l'environnement ont déploré la décision, accusant la première économie mondiale «de revoir les ambitions à la baisse et de tirer les autres vers le bas», selon Harjeet Singh, directeur responsable du changement climatique pour l'ONG Action Aid.

Regret de la France

«Je regrette (...) que nos discussions aujourd'hui n'aient pas pu aboutir de manière satisfaisante» sur la lutte contre le changement climatique, une des «priorités absolument essentielles dans notre monde actuel et sur lesquelles la France souhaite que le G20 continue à agir fermement et de manière concertée», a réagi le ministre français des Finances Michel Sapin.

Contrairement au silence du communiqué de Baden-Baden sur le sujet, celui publié à l'issue du G20 de Hangzhou promettait «un appui» et «des mesures fortes et efficaces pour faire face aux changements climatiques».

John Kirton, du think tank G20 Research Group, ne s'étonne pas d'une telle position américaine, car mentionner l'accord de Paris reviendrait à le légitimer, et M. Trump avait fait campagne en affirmant qu'il pourrait retirer les États-Unis de l'accord signé sous la présidence de Barack Obama.

C'est «très décourageant», a commenté M. Singh, soulignant que «les pauvres dans les pays en développement sont déjà confrontés au changement climatique», comme le montre par exemple la sécheresse dans la Corne de l'Afrique.

«Un pays tel que les États-Unis a une responsabilité historique et devrait être un champion dans cette lutte, mais au lieu de cela, il pousse les autres vers le bas», a-t-il déclaré à l'AFP.

Wendel Trio, directeur de l'ONG Réseau Action Climat Europe, estime toutefois que les réticences de Washington ne signifient pas la mort de l'accord de Paris, vu qu'il a déjà été signé. Mais cela a un «impact symbolique», a-t-il confié à l'AFP.

«Le fait que les États-Unis envoient un tel signal va pousser les autres pays, comme l'Arabie Saoudite ou l'Iran, à leur emboîter le pas», a-t-il craint.

À quatre mois du G20 des chefs d'État et de gouvernement à Hambourg en juillet, Li Shuo, de Greenpeace East Asia, estime que «les autres pays ne devraient plus permettre que cela se reproduise».