À la veille de la Journée internationale d'action pour le climat, l'admission, par le ministre de l'Environnement Jim Prentice, qu'il croit que le Canada devrait avoir des cibles de réduction d'émissions moins contraignantes que les pays européens a soulevé la colère de l'opposition à Ottawa.

«Les déclarations du ministre de l'Environnement dépassent les bornes, a jugé le leader parlementaire du Bloc québécois, Pierre Paquette. C'est totalement ridicule comme approche et ça illustre la volonté du gouvernement conservateur de saboter les négociations à Copenhague.»

 

Dans une entrevue au Globe and Mail, hier, le ministre Prentice a affirmé que compte tenu de sa structure industrielle énergivore et de la croissance soutenue de sa population, le Canada ne devrait pas avoir des objectifs aussi contraignants de réduction d'émissions de gaz à effet de serre que, par exemple, l'Europe ou le Japon.

À l'approche de la conférence internationale sur les changements climatiques de Copenhague, en décembre, les pays du monde entier entament un dernier sprint afin de conclure une entente commune pour remplacer le protocole de Kyoto, qui vient à échéance en 2012. Mais déjà, Ottawa réduit les attentes en affirmant que la conclusion d'une entente historique est peu probable, faute de temps pour négocier. Les pourparlers achoppent sur plusieurs points, entre autres sur le fait que le Canada réclame que les pays aient des objectifs de réduction différents, plutôt qu'une cible commune.

«Il se rend à la plus importante rencontre environnementale de l'histoire de notre pays et essentiellement (le ministre Prentice) dit que c'est peine perdue», a déploré le député néo-démocrate Paul Dewar.

«Non seulement le Canada n'a pas respecté sa signature au bas du protocole de Kyoto, mais il n'a pas cessé de saboter les négociations pour la suite», a critiqué, quant à lui, M. Paquette.

Le ministre du Commerce international, Stockwell Day, a pris la balle au bond et rejeté une partie de la responsabilité sur le précédent gouvernement.

«Ce sont les libéraux qui ont signé l'accord de Kyoto et ils n'ont rien fait. Nous avons fait beaucoup de choses, a-t-il assuré. Nous avons mis en place les niveaux et aussi les programmes pour réduire les émissions.»

Manque d'ambition du gouvernement

Les partis de l'opposition et les groupes environnementalistes reprochent depuis des années au gouvernement de Stephen Harper son manque d'ambition dans la lutte contre les changements climatiques.

Pour le critique libéral en environnement, David McGuinty, Ottawa se cache derrière l'idée d'un plan «continental», qui n'existe pas, pour éviter d'aborder la question de front.

«Nous ne sommes pas en train d'avoir un dialogue énergétique avec les États-Unis, comme pays indépendant. Maintenant, selon M. Prentice, nous faisons partie d'un plan nord-américain pour les changements climatiques. C'est une nouveauté pour les Américains et les Mexicains, a ironisé M. McGuinty. Où est ce plan nord-américain pour les changements climatiques? C'est une ruse pour cacher le fait que le Canada n'a pas de plan domestique et que le ministre ne veut pas voir d'entente à Copenhague.»

Le Parti vert du Canada s'est lui aussi insurgé contre les propos jugés «décourageants» du ministre quant à l'issue des négociations à Copenhague.

«L'obstination du Canada à réclamer un traitement de faveur signifie qu'une réussite pour le pays sera un désastre pour la planète», a souligné dans un communiqué Adriana Mugnatto-Hamu, porte-parole du Parti vert dans le dossier des changements climatiques.

De nombreux groupes environnementalistes participeront aujourd'hui à la Journée internationale d'action pour le climat dans plusieurs villes canadiennes. À Ottawa, un groupe de manifestants entend se rendre très tôt devant la résidence du premier ministre Stephen Harper pour lui transmettre le message qu'il est temps de «se réveiller» dans le dossier des changements climatiques.

À Montréal, des membres de différents groupes écologistes, dont Équiterre et Greenpeace, se réuniront pour une «grande cacophonie» de 350 secondes, à l'aide d'instruments traditionnels ou «imaginatifs».