À la veille des prochaines négociations en prévision d'un nouveau traité international sur les changements climatiques, les environnementalistes somment le gouvernement canadien de changer son fusil d'épaule et d'accepter de contribuer financièrement pour aider les pays en développement à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

En conférence de presse à Ottawa, les représentants de plusieurs groupes environnementalistes réunis dans le Réseau action climat ont dénoncé le «manque de leadership» du gouvernement conservateur de Stephen Harper ainsi que la nouvelle position du ministre de l'Environnement, Jim Prentice, qui «attend Washington» pour agir dans le dossier.

 

Le 1er juin débute à Bonn, en Allemagne, d'importantes négociations où, pour la première fois, des textes juridiques seront étudiés dans le but de conclure une entente internationale à Copenhague, en décembre prochain.

«Le Canada arrive à ces négociations avec zéro crédibilité, a estimé Dale Marshall, analyste à la Fondation David Suzuki. Ce qu'on voit au Canada, c'est un manque total de leadership. Si on veut vraiment jouer un rôle constructif, à l'égard des États-Unis mais aussi sur le plan international, il faut qu'on sente le besoin d'urgence, et ce n'est pas du tout le cas.»

Le principal enjeu discuté à Bonn sera la contribution financière des pays industrialisés aux efforts des pays en développement pour s'adapter aux changements climatiques et réduire leurs émissions de GES, à l'aide notamment de transferts technologiques. La question divise les deux camps.

L'Institut Pembina chiffre à entre 2 et 6 milliards de dollars la «juste part» annuelle du Canada dans l'effort international pour appuyer les pays en développement.

Clare Demerse, de l'Institut Pembina, rappelle que le Canada a pris l'engagement, même récemment, lors de la signature du traité de libre-échange avec l'Union européenne, de contribuer à l'effort financier international.

Le non-respect des engagements de Kyoto a terni la réputation canadienne en matière de lutte contre les changements climatiques, soutiennent les environnementalistes.

«Tous les modèles économiques démontrent que plus on attend longtemps avant d'agir pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, plus ça va coûter cher», a critiqué M. Marshall.

L'inaction a déjà un coût, a ajouté Mme Demerse: l'Institut Kofi Annan calcule dans un récent rapport que les changements climatiques causent pour 125 milliards de dollars par an de pertes économiques.

Jeudi, le ministre Prentice a affirmé que le Canada attendrait la mise en application des mesures américaines pour imposer des contraintes de réduction d'émissions de gaz à effet de serre aux industries du pays, soit pas avant 2012 à 2016.

«Ce qu'on a devant nous maintenant, c'est un gouvernement qui n'a pas de stratégie, qui n'a pas de politique, qui n'a pas de plan et qui s'apprête à jouer un rôle de plante verte sur la scène internationale et canadienne», a déploré hier le critique du Bloc québécois en environnement, Bernard Bigras.

Le député conservateur de Langley, Mark Warawa, s'est porté à la défense du ministre de l'Environnement et a assuré que le gouvernement fédéral faisait preuve d'un «leadership fort» sur la scène internationale.

Le temps presse, notamment pour les pays les plus pauvres de la planète, aux prises avec de plus en plus de catastrophes naturelles.

«La terrible injustice des changements climatiques est que les populations les plus pauvres sont les plus touchées, mais ce sont elles qui ont le moins contribué au problème», a souligné Mark Fried, d'Oxfam-Canada.