La Pologne maintient son refus du plan de lutte européen contre le changement climatique qui la ferait renoncer au charbon, alors même qu'elle accueille en décembre la prochaine conférence mondiale sur le climat à Poznan (ouest).

«Nous soutenons l'objectif final mais pas les moyens d'y parvenir», a déclaré mardi le ministre de l'Environnement Maciej Nowicki. «Le paquet énergie-climat (PEC, le plan de l'UE) n'est pas acceptable et contient des erreurs».

La veille, le premier ministre Donald Tusk avait estimé que ce dispositif «conduirait à augmenter le prix de l'électricité de 90%».

Le PEC, qui doit être adopté d'ici la fin de la présidence française de l'UE en décembre, est conçu pour conduire l'Union à réduire de 20% ses émissions de gaz à effet de serre en 2020 par rapport à 1990.

Pour y parvenir, la Commission européenne propose notamment la mise aux enchères de chaque tonne de CO2 émise par l'industrie lourde, (40% des émissions annuelles de l'Union) à compter du 1er janvier 2013 et de consacrer les fonds ainsi recueillis à la transition vers une énergie propre.

La Pologne dont la production d'électricité dépend à 90% de l'exploitation du charbon --particulièrement polluant-- juge ce plan trop coûteux pour son économie. Elle réclame des aménagements particuliers. Et elle mène la fronde avec d'autres États membres, dont les nouveaux entrants de l'Est, dans une même situation de dépendance énergétique.

Officiellement, elle refuse de miser sur une minorité de blocage à Bruxelles mais, en coulisses, elle fait savoir qu'elle peut le faire. Elle espère arracher que la mise aux enchères des quotas de CO2 se fasse de manière progressive, en augmentant un peu plus chaque année les quantités à partir de 2013.

«On ne peut pas se permettre de sauter dans la piscine sans savoir si elle est vide: ce plan comprend trop d'incertitudes, surtout en période de tsunami financier», justifie le secrétaire d'État à l'Economie chargé des questions internationales, Marcin Korolec.

Comme son collègue de l'environnement, il considère même qu'adopter le PEC avant le rendez-vous climat des Nations unies à Poznan, sous présidence polonaise, ferait mauvais effet: «Nous sommes comme les Chinois et les Indiens de l'UE: si on veut être exemplaires, soyons-le aussi pour ceux qui comme nous dépendent du charbon. Sinon, on va leur envoyer un mauvais signal».

Que le secteur de l'énergie soit aux mains de l'État à plus de 80%, «influence la politique climatique du gouvernement», remarque Henryka Bochniarz, présidente du Lewiatan, organisation patronale de 3.000 entreprises privées.

Mais les parlementaires suivent les ministres. «L'objectif européen aura un impact social très dur», prévient le sénateur Mieczyslaw Augustyn, président de la commission des affaires sociales qui s'inquiète aussi de voir son pays privé de charbon et livré au gaz russe.

«Nous avons déjà réduit de 32% nos émissions depuis 1990 alors que d'autres augmentaient les leurs de 40%. Nous ne voulons pas être pénalisés», insiste-t-il. Comme d'autres pays post-communistes, la Pologne a surtout obtenu ces résultats en fermant des installations industrielles totalement obsolètes.

Même le président du parti vert Zieloni, Dariusz Szwed, se montre prudent malgré son soutien au PEC: «Une mise aux enchères intégrale dès 2013 sera difficile pour l'industrie polonaise et constitue un risque réel pour sa compétitivité», juge-t-il.

La France est prête à des compromis. «La Pologne entretient un lien culturel très fort avec son charbon. Certaines de ses plaintes, notamment concernant sa sécurité énergétique, peuvent être entendues», a estimé la secrétaire d'État française à l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, mardi à Varsovie.

Mais elle a souligné que l'UE devait arriver à Poznan avec une vision commune.