Une «bombe à retardement» au méthane, dans le fond de l'océan, menace de réchauffer le climat de façon catastrophique, selon une nouvelle étude.

Les résultats préliminaires de l'étude indiquent qu'une quantité importante de méthane - un gaz à effet de serre beaucoup plus puissant que le gaz carbonique - est en voie d'être libérée à la surface de l'océan, au nord de la Russie.

Le méthane est actuellement retenu par le pergélisol. Les chercheurs, qui travaillent sur un navire au large de la Russie, affirment toutefois que le pergélisol semble être en train fondre, ce qui permettrait au méthane de se rendre à la surface.

Selon Marianne Douglas, qui dirige l'Institut circumpolaire canadien de l'Université de l'Alberta, les récentes recherches soulèvent des questions importantes.

«Il s'agit d'une bombe à retardement, parce qu'au fur et à mesure que le pergélisol dégèlera - et nous ne savons pas à quelle vitesse il dégèlera -, il libérera lentement, et peut-être de façon catastrophique, tout le méthane qui est emprisonné en dessous sous forme solide.»

Certains scientifiques croient qu'une libération soudaine de méthane pourrait avoir fait hausser brusquement la température mondiale, il y a des millions d'années.

«Il existe des preuves, dans le profil géologique, que cela s'est produit dans le passé il y a environ 55 millions d'années», a expliqué Mme Douglas, qui a ajouté qu'une énorme libération de méthane a fait augmenter de jusqu'à 6 degrés Celsius, sur une période de 20 000 ans, la température de la Terre.

Dale Marshall, analyste à la Fondation David Suzuki, croit cependant que les gens ne doivent pas perdre espoir et abandonner la lutte aux changements climatiques à cause des résultats de cette recherche. Selon lui, ce ne sont qu'une raison de plus de combattre le réchauffement de la planète.

Les scientifiques, dit-il, affirment que la glace polaire est en train de fondre, ce qui permet aux rayons de soleil de faire fondre le pergélisol qui a, jusqu'à maintenant, empêché la libération du méthane.

«Pour une personne moyenne, il s'agit d'une preuve de plus qu'il est urgent de s'occuper du problème», a indiqué M. Marshall.

D'autres chercheurs qualifient pour leur part d'alarmiste l'idée d'une libération catastrophique de méthane et soulignent que des modèles informatiques démontrent qu'il faudrait des milliers d'années pour que le pergélisol ait assez fondu pour laisser passer le méthane.

D'autres encore voient les dépôts de méthane au fond de l'océan comme une solution potentielle au problème énergétique mondial.

Andrew Applejohn, directeur de l'Institut de recherche Aurora, à Inuvik, dans les Territoires du Nord-Ouest, fait partie d'un projet de recherche des gouvernements canadien et japonais visant à déterminer si le méthane emprisonné sous le pergélisol peut être transformé en source d'énergie.

«L'histoire est présentée sous deux angles différents, incluant l'angle alarmiste et cataclysmique du réchauffement climatique et l'angle de la ressource énergétique potentielle, a-t-il soutenu. Cela prouve qu'il en reste beaucoup à apprendre, à étudier et à déterminer des deux côtés.»